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vendredi 24 février 2012

Palau J7 : Bablomekang - Ngemelis Beach


Seventy Islands

Long Beach
La nuit dernière j'ai nourri un rat ! J'avais jeté au loin une mandarine couverte de moisissures, qui avait fini sa course au pied d'un arbre où se trouvait un trou entre les racines. Ce matin je suis allé voir si elle avait disparu. Elle était toujours là, ayant juste roulé de côté. Mais quand j'ai donné un coup de pied dedans, j'ai vu que tout avait été mangé à l'intérieur. Il ne restait plus que la coquille. Même l'espèce de filet fibreux qui couvre l'intérieur de l'écorce avait été grignoté. C'était prêt à farcir pour faire une belle mandarine givrée. C'est gourmet un rat ! Ils n'ont pas touché à l'écorce qui ne leur apportait aucun élément nutritif. Pendant qu'ils dégustaient leur mandarine bien sucrée, j'ai eu du mal à dormir. Je n'avais pas fait attention mais l'abri est caché sous la végétation et quand je m'étais installé il n'y avait pas de vent. Mais il s’est mis à souffler dans la nuit et ça a été un festival de grincements, de branches qui balayent la tôle ondulée et d'espèces de fruits à coque qui sonnent les cloches en tombant comme des pierres. 
Long Beach
Ce qui fait que dès 4H30 j'étais debout. Ça m'arrangeait bien, pas question de partir tard ce matin vu la route qui m'attend. Je veux avoir du temps pour me poser et profiter. Mais entre l'écriture, le rangement et le petit déjeuner il était malgré tout 9 heures quand je suis parti.
J'ai commencé par faire un tour des îlots environnants : Long Beach et Jackson's Beach où j'aurais pu camper si le mauvais temps n'avait pas précipité mon choix. En plus de me rapprocher de mon but, ces plages offraient en plus l'avantage d’être exposées toutes deux vers l'ouest. Cela ne m'est arrivé qu'une seule fois à Ngeremdiu et c'est tout de même plus agréable de dîner face à un coucher de soleil qui permet de surcroît de savoir de combien de temps on dispose avant que la nuit ne tombe. J'ai bien pris une heure à faire le tour de ces plages et à amarrer le kayak. Ce n’était pas prévu à mon programme mais j'aime bien explorer les petits îlots déserts dont aucun ne se ressemble vraiment. Ils ont tous leur petite particularité. 
Je préfère ça à la plongée en eaux profondes. Un dernier coup d’œil à la carte m'a permis de rectifier ma trajectoire. Je mettais en fait le cap vers Carp Island, plus proche que Ngemelis où je devais me rendre. C'est marrant parce que Carp Island c'est là où je vais demain, aussi comme les deux îles ne sont pas trop distantes l'une de l'autre ce sera une courte traversée, pour mon plus grand bonheur.
Pour rejoindre Ngemelis, je dois passer le long d'un chenal que tous les bateaux de plongée empruntent. On ne peut pas se perdre, il suffit de les suivre. J'ai préféré longer le chenal sur la gauche, puis du côté droit, naviguant ainsi dans de l'eau moins profonde à la couleur turquoise où je voyais le fond. Plusieurs fois j'ai croisé des tortues qui prenaient des bains de soleil à la surface, les pattes en croix. De loin je pensais que c'était des débris végétaux comme j'en vois pas mal. 
Jackson's Beach
Quand j'ai réalisé, c'est pour aller farfouiller à la recherche de l’appareil photo mais c'était déjà trop tard. Trop proche, elles avaient déguerpi vers les profondeurs. Ce sont les mêmes qu'à Lady Musgrave. Des petites marrons tachetées. C'est étonnant car j'étais justement en train de songer à la similitude du décor avec Lady Musgrave et donc pas étonné si je devais voir des tortues. Et pile à ce moment, comme si elle avait lu mes pensées, une tortue est apparue.
Sur un bateau tout seul je cogite pas mal. Quand je ne chantonne pas des airs en boucle dans ma tête (c'est un vrai juke-box!) que bien souvent je déteste – aujourd'hui c'est « Rolling into deep » d'Adele, entendu hier au déjeuner avec les japs – j'ai des images de ma vie qui surgissent. Je fais dans l'introspection. Le cadre et les conditions s'y prêtent bien. Je réfléchis pourquoi et comment je suis devenu ce que je suis, où j'ai chopé ce virus du voyage, de qui je tiens ça, qui m'a donné ce goût de la nature et de l'aventure.
German Channel
Et je me revois à 5 ans en culotte courte avec des parents rajeunis, assis dans les prés à cueillir des fleurs. C'est tout ce que j'ai fait petit, tout ce que j'ai ressenti et cet air pur autour de moi qui m'a façonné. Je tiens cela de ma maman qui ne ratait jamais une occasion d'aller faire un pique nique en pleine nature dès qu'il faisait beau, parfois pas plus loin que le jardin. Les week-ends et mercredis après midi je l'entends encore nous houspiller mon frère et moi, disant : « Vous n'allez pas rester enfermés par une journée pareille. Allez dehors, décanillez je ne veux plus vous voir ! ». Et on prenait nos vélos, explorant la campagne et les forêts autour de nous. Je dois donc le goût de l'aventure à mon frère, plus âgé que moi, qui avait un peu tendance à se servir de moi comme éclaireur et test quand il n'était pas sûr de lui. Et évidemment les gamelles m'étaient destinées et cela le faisait beaucoup rire. Je rentrais toujours avec un bobo ou un truc déchiré. Je pense à tout ça en pagayant, à tout ce passé qu'on garde le plus souvent enfoui. Ce n'est pas de la nostalgie qui remonte, juste des flashs et des impressions qui resurgissent. Des parfums aussi. C'est comme si tout avait été hier, le temps est effacé. J'espère qu'il en sera de même avec les souvenirs de ce voyage.
German Channel
Dans German Channel, je recommençais à me donner des paliers pour me donner du courage et faire paraître les distances plus courtes. Car la terre a toujours l'air d’être près vue de loin. Il y a de quoi se décourager. Mais avec ce système que j'ai trouvé ça marche bien. Je suis requinqué ce matin, ça glisse tout seul, même si ma faiblesse au dos subsiste. Je fais donc d'autant plus attention quand je dois tirer le navire à terre. Pour faire passer le temps je compte donc les coups de pagaie. Tantôt c'est « je souffle arrivé à 100 » ou bien ça donne « à 100 je bois » quand ce n'est pas « à 100 je regarde la carte » ou encore « je me remets de la crème à 100 ». C'est toujours par coup de 100 pagaies sinon je n'avancerais pas beaucoup. Parfois la variante devient « je m’arrête au niveau de la bouée là bas ». Ou bien « je vais plonger voir ce que font tous ces bateaux amarrés aux bouées là bas ». Car en quittant German Channel, il y a tout un tas de bateaux de plongée avec personne à bord, comme ces navires fantômes contés dans les récits d'aventures, en proie aux pirates ou aux sirènes. 
Ngemelis
J'ai attaché le kayak à la cheville gauche et j'ai sauté, le courant m'ayant un peu éloigné entre temps des parois du chenal. J'ai eu grand peine à quitter ce trou d'eau profond et jonché de débris de coraux, luttant contre le courant pour rejoindre l'à-pic. Comme toujours dans ces sites de plongée, c'est trop profond et le jeu n'en vaut pas la chandelle. Il faut batailler avec le courant et toute photo devient impossible, entre les fonds trop profonds et le courant qui empêche de faire une mise au point sur un sujet précis. C'est à désespérer. Il a fallu que fasse plusieurs survols pour essayer de photographier une porcelaine géante. Quand la mise au point était bonne, j'avais déjà filé, le porcelaine se trouvant alors hors champ. Et quand je retournais en arrière un nuage passait, rendant la luminosité catastrophique et la photo floue. En plus avec le temps qui passait, la buée dans l'appareil était de retour. Ça m'a énervé, je suis donc sorti de là. A temps car un gros nuage noir avançait vers moi et la pluie s'abattait déjà avec fracas sur les îles que je venais de quitter. J'étais en plein milieu de l'océan et je ne tenais pas à affronter une tempête dans un endroit pareil, perdant alors tout repère visuel. En plus, entre temps tous les bateaux avaient disparu pour s’arrêter butiner à un autre site de plongée plus loin.

Ngemelis

Ngemelis
A ce qui semblait le plus proche, dans la direction de Ngemelis, se trouvaient deux îlots sur ma droite qui pourraient me permettre de m'abriter sous leurs flancs. J'ai donc donné de grands coups de rame, épuisant mes forces alors que jusque là j'avançais à un rythme de croisière pour m'économiser. Je jetais des coups d’œil en arrière pour jauger de la situation. Ça avançait à grand pas, la bouée que je venais de quitter était déjà dans la tourmente. Au dessus de moi le ciel était noir mais il ne pleuvait toujours pas. Comme par miracle je me suis trouvé sur le bord du passage du nuage dont je n'ai subi que quelques gouttes d'eau tandis qu'à quelques mètres tout disparaissait caché derrière un rideau de pluie très drue. J'ai eu de la chance sur ce coup là et une fois au niveau des îlots je n'ai même pas eu à m'abriter.
Avec cet épisode imprévu de gros grain, j’avais dévié de ma trajectoire. Il était prévu que je contourne Ngemelis par l'est puis le sud, pour explorer une multitude de spots de snorkeling qui jalonnent cette côte : Big Drop-off, New Drop-off, Virgin Blue Hotel et Blue Corner. 
Les bateaux traversent tous les jours les Rock Islands pour amener leur cargaison d'hommes grenouilles. Il paraît que c'est le meilleur spot de plongée de Palau et Rex avait le regard enflammé en m'en parlant (il prépare sa certification de plongeur pour diversifier ses activités de guide). C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Ngemelis figure sur mon itinéraire. Eh bien j'ai squeezé tout ça, après l'épisode malencontreux à German Channel, je n'avais pas envie de réitérer la chose, avec un kayak qui me cisaille la cheville, à me débattre contre un courant loin des côtes. Sans compter que cela allait me retarder et que j'allais encore arriver au camp au dernier moment, sans avoir eu le temps de me poser un peu. Mais surtout de l'autre côté de mon rocher-abri s'ouvrait un lagon aux couleurs incroyables, frangé de plages avec des cocotiers tout du long. 


Ngemelis est en fait formée de 4 îles qui se suivent comme des chipolatas pour former un L. Ces îles sont quasi plates, à la différence des autres Rock Islands, aussi les cocotiers trouvent plein de place où s'ancrer, ce qui explique leur concentration plus forte qu'ailleurs. Je me suis arrêté au milieu du lagon. C'était une merveille, j'avais de l'eau à mi cuisse, pourtant loin des îles et le cadre à tomber. Je suis dans le plus beau coin des Rock Islands, tout autour on ne voit que des îles, c'est sidérant. Il y en a tellement qu'on ne peut plus les compter. Elles se chevauchent et se scindent quand on passe devant. J'ai trouvé le paradis. Encore plus beau que la Polynésie, totalement désert et vierge. Et il a un nom : Ngemelis. Un nom à se souvenir qui rime avec délice. Ici pas de gens, pas de chiens, pas de coqs. Il n'y a nul autre endroit sur Terre où l'on peut évoluer ainsi d’île en île sans croiser l'ombre d'une présence humaine.
La plage du campement!
J'ai contourné l'intérieur du L pour me rendre sur une plage bordée de cocotiers. J'ai grimpé sur un petit rocher au milieu de l'eau afin de prendre un peu de hauteur et contempler ce lagon avec un œil d'aigle. De temps en temps il y a de petits avions à hélice qui passent par là pour faire la liaison Koror-Peleliu. Leurs passagers doivent être scotchés au hublot. J'aimerais bien voir ça d'avion, ça doit être à couper le souffle. Mais le retour de Peleliu se fera en bateau, la faute au kayak à ramener sur Koror. D'un autre côté cela me permettra de repasser devant les endroits que j'ai explorés, me remémorant chaque partie du périple, comme en train de feuilleter un album photos. Ce qui me fascine ici c'est d’être seul dans un tel cadre et que ce soit si préservé. Pas d’île hôtel, aucune possibilité de logement autre que ce que je fait – à part sur Carp Island. Et aucun bateau ne fait la liaison vers les les îles que je visite donc je ne sais même pas comment on peut y camper si l'on n'a pas de kayak. 
De ce fait les îles se retrouvent désertes, ne servant que d'endroit à pique niquer pour les plongeurs. Et à Ngemelis les bateaux ne peuvent même pas accoster, le lagon est trop peu profond. Je l'ai exploré à marée basse, de l'eau à la cheville, pouvant marcher ainsi des kilomètres et donnant l'impression de marcher sur l'eau. C'est vraiment étrange qu'aucun complexe hôtelier n'ait essayé de s'implanter. Les habitants de Palau doivent vraiment tenir à leur joyau et s'en foutre de l'argent qui d'habitude corrompt tout. Pour cela je les félicité chaudement. Ils ont fait des Rock Islands un paradis sur Terre, inhabité, vaste et merveilleux à découvrir en kayak. Comment ai-jeu cette idée de génie ? Je me le demande mais c'est vraiment le choix idéal. Imaginez : 9 jours au paradis, dormant où bon me semble ou presque, folâtrant d'une île à l'autre.

Qui a dit le camping c'est nul?

A Ngemelis Beach, le camp est très bien arrangé. L'abri dispose même de murs et de volets qu'on peut tirer pour se protéger du vent. Les estrades sont faites de bois plein et non pas de lattes. Il y a aussi des citernes qui recueillent l'eau de la gouttière avec un robinet qui m'a permis d’alimenter la douche solaire et de faire la vaisselle. Dans un autre temps il devait y avoir l'électricité (sans doute avec un groupe électrogène) car il y a encore les ampoules au plafond et des prises électriques. L'abri est le plus vaste de ceux que j'ai rencontrés. Ça fait comme un grand dortoir et on peut facilement y dormir à plus de cinquante, en disposant des matelas sur les estrades. Il y a aussi un coin grill avec des bûches à disposition et des claies. L'avantage de Palau c'est aussi qu'il n'y a pas de moustiques, sauf rares endroits, croisés seulement au début le jour de pluie où je m'étais abrité sous un rocher pendant des heures. 
On peut donc dormir à la belle étoile sans crainte. Toutes les nuits je laisse d'ailleurs les portes de ma tente ouvertes. C'est bien le seul endroit tropical que je connaisse sans insecte volant. La raison est qu'il n'y a pas de trous d''eau où pourraient se développer les larves. Les lacs sont salés, le relief impropre au développement de mares et tout est squatté par une jungle qui aspire la moindre goutte d'eau. Avec toute cette forêt, il y a donc un intérêt supplémentaire : se refaire une santé en respirant un air bien pur et gorgé d'oxygène. Dommage que le Japon soit si proche et que l’île ait été affectée en partie par les retombées de l'accident nucléaire de Fukishima. J'ai lu dans le journal local de Guam que le gouvernement avait été courtisé par deux constructeurs différents de centrales nucléaires qui promettent des centrales nouvelle génération sans rejet de déchets radioactifs. Mon œil ! Et ça lave plus blanc que blanc aussi ? Le gouvernement n'avait pourtant fait aucun appel d'offres mais avec leur technologie moribonde dont plus personne ne veut, ils essaient de refourguer ça à n'importe qui. A part les français. On est toujours les premiers pour mettre en place les trucs les pires mais toujours les derniers à adopter des mesures intelligentes. De toute façon Guam veut se tourner vers l’éolien et le solaire pour s'affranchir de leur dépendance au pétrole. Dans un pays tropical on n'a pas besoin de nucléaire !

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Ngemelis Beach est reliée à une autre île à marée basse, une espèce de chapeau de champignon flottant sur l'eau. Il y a un banc de sable d'une cinquantaine de mètres qui sépare deux cocotiers ! Juste en face se trouve un groupe d’îles protégées et inaccessibles qui ne semblent former qu'une seule île pleine de recoins : Seventy Islands, une réserve dans la réserve, interdite de passage et de pêche. Vue la topographie de cet ensemble, je ne serais pas étonné que ce soit cet endroit dont les photos aériennes font le tour de la Terre sur les couvertures de livre et les écrans de veille d'ordinateur du monde entier. On dirait des jouets de bain qui auraient tous convergé au même endroit, entourés par un lagon aux couleurs phosphorescentes. Si Yann Anus Bertrand n'est pas passé par là, c'est à n'y rien comprendre !
Alors que je marchais dans l'eau pour prendre quelques clichés (et même beaucoup, je n’arrête pas!), il y avait un petit banc de menu fretin qui n’arrêtait pas de virevolter dans dix centimètres d'eau. 
J'ai vite compris pourquoi : ils avaient un mini bébé requin de 30 cm de long à leurs trousses qui devait bien en croquer un de ci de là car il avait le nez dedans ! Ailleurs j'ai vu des requins plus grand, les mêmes qu'en Polynésie, les bruns à pointes noires. Il faudra que j'aille essayer de les prendre en photo toute à l'heure.
Je voudrais capturer ce paysage, le mettre en bocal pour le ramener et le garder avec moi, figeant cet instant pour toujours. Mais je ne peux pas. A la place je devrai affronter à mon retour des choses laides quotidiennement : le RER, des panneaux de pub partout qui nous laminent le cerveau pour nous faire consommer toujours plus. Je déteste la pub. Elle devrait être interdite, c'est une pollution visuelle insupportable qui cherche à violer insidieusement notre conscience sous des airs sucrés et des voix susurrées. Mais avec moi ça ne marche pas. Je fais un rejet. Au cinéma je ferme les yeux et mets les écouteurs du baladeur au moment des pubs alors que les autres regardent, captifs. On doit me trouver dérangé. Dans le métro je suis contraint de regarder mes pieds en prenant les couloirs et d'attendre le train en tournant le dos à la voie pour ne pas voir les affiches en face. C’est un vrai travail de résistance qui m'épuise parfois. Ici rien de tel, rien n'est à vendre, tout est donné ! J'ai donc l'esprit libre et le cerveau qui peut cogiter comme il le souhaite. Plus de limite, plus de conditionnement. Comment vais-je vivre le retour à la réalité, passer mon temps entre quatre murs quand ici ma vue court vers l'horizon en permanence ? Ne vais-je pas me sentir en cage après tout ça ?


C'est combien la passe?
En attendant, ne pouvant faire mieux, je me contente de remercier la vie à voie haute : « Merci Jésus pour tout ça, pour me montrer ce qu'est le paradis avant l'heure ». Il y a un tel endroit sur Terre, c'est Ngemelis, Palau, Micronésie. Mais ne le dites à personne ! Un endroit touché par les anges. Qui surpasse la Polynésie. Il fallait pouvoir le faire. On ne sait plus où donner de la tête. On dirait que l'horizon est un gruyère. Ceux qui viennent ici pour ne faire que de la plongée ne verront pas ça. Pourquoi passer son temps dans l'eau quand le spectacle est aussi beau sur terre ?
Après le déjeuner, comme il était encore tôt, j'ai repris le kayak. Je voulais faire un tour de l'autre côté du L, là où tout le monde se presse pour plonger. Mais j'ai été stoppé net dans mon élan en traversant une passe étroite qui offrait de beaux tombants. J'ai plongé là, non sans une certaine anxiété car c'était la voie de passage pour les requins qui veulent aussi aller d'un côté à l'autre. 
On dit qu'ils n'attaquent pas l'homme mais quid d'un individu ayant revêtu un maillot de bain rouge pour les exciter ? Ils auraient pu me trouver fort appétissant ainsi, sans compter qu’avec le kayak flottant autour, vu du dessous ça peut faire penser à un mammifère marin en train de nager. Mais rien de cela n'est arrivé, sauf la traditionnelle buée sur l'objectif. J'ai vu de gros bénitiers tout verts où j'aurais pu mettre la tête dedans. Finalement, dans peu d'eau j'en vois plus qu'en sautant en pleine mer et ça me convient bien mieux.
Ce soir, comme je disposais d'une cuve d'eau, j'en ai profité pour prendre une douche sans devoir me rationner. La pleine poche de la douche solaire y est passée. J'étais propre comme un sou neuf. Avec le temps je me trimbale de plus en plus à poil sur le camp. Il n'y a personne, j'ai pris conscience de plus en plus d’être un Robinson. Alors ça choque qui? 
C'est comme la porte des cabines de chiotte écolo, elle est toujours ouverte. Un réflexe de plus dont je me suis débarrassé. Je vais droit à l'essentiel. D'avoir bypassé les pauses plongée, ça m'a laisse beaucoup plus de temps pour apprécier les choses. J'ai sans doute passé la meilleure journée de mon expédition et j'ai eu tout le temps nécessaire pour préparer le dîner sans être pressé par le jour déclinant. C'est dommage qu'il ne me reste plus qu'une nuit après. Je serais bien rester plus longtemps, maintenant que je suis bien adapté. Et ce n'est pas le genre d'endroit où l'on peut revenir facilement. Si je devais revenir ce ne pourrait être qu'à nouveau en kayak. Et l'ayant fait une fois, l’intérêt serait moindre de le faire à nouveau et la fatigue générée par l'effort prendrait le dessus. Tout est question de mental. Non, cette expédition est le voyage d'une vie, que l'on ne fait qu'une seule fois, comme une naissance. Et c’est ce qui rend l'excursion encore plus exceptionnelle. On est obligé de savourer chaque instant, d'emmagasiner le plus de choses dans son cœur car on sait que ce paradis ne nous sera offert qu'une seule fois.


2 commentaires:

  1. C vraiment bo qd meme teb

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    1. C'est ce que je disais. Le plus beau paysage tropical jamais rencontré. Vous avez vu les méduses dans l'épisode d'avant?

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