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lundi 6 février 2012

Fraser Island


Fraser Island est la plus grande île sableuse au monde, de 120 km de long sur 15 de large, classée intégralement parc national et inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco. Elle est inhabitée comme il se doit, sauf par des dingos et autres bestioles. L'île est une forêt vierge subtropicale pleine de lianes et de toute sortes d'arbres dont de très nombreuses espèces d'eucalyptus au tronc tantôt blanc, rouge ou noir et dressés fièrement vers le ciel ou tortueux comme des bonsaïs géants. C'est le seul endroit au monde où l'on trouve une forêt vierge pluviale poussant sur du sable. L'île est parcourue par une multitude de rivières, les « creek », et par des lacs aux eaux cristallines et au sable blanc. C'est un petit paradis sauvage que l'on ne peut pas manquer quand on vient dans le Queensland. D'ailleurs les aborigènes, les Butchulla, l'appelaient « K'Gari », qui veut dire « paradis ». Depuis ils ont été chassés et interdits de parler leur langue et l'île n'est plus qu'un domaine pour touristes, visité par 350.000 personnes par an.
Pour parcourir l'île qui ne dispose d'aucune route hormis des pistes de sable, on ne peut le faire qu'en 4x4, en en louant un avec plusieurs amis depuis la côte, ou en se joignant à un tour comme ce que j'ai fait. Notre bus aujourd'hui est un genre de petit camion de chantier haut perché aux roues énormes avec une cabine au dessus toute de vitres teintées dont on ne voit rien à l'intérieur. 17 places sont disponibles à bord en comptant le conducteur et guide, un jeune roux dont j'ai eu beaucoup de mal à comprendre ce qu'il disait - un descendant gallois sans doute. Aujourd'hui nous ne sommes que 14 ce qui fait que j'ai pu choisir ma place, que je changeais au gré de mes envies. Du côté gauche de la cabine ce sont des sièges individuels alors qu'à droite ce sont des biplaces. Au début je m'étais mis devant pour avoir plus de place pour les jambes mais le siège côté passager de devant me bloquait la vue avec son siège plus haut que les autres et son appui tête façon dos de lit. Au premier arrêt je me suis installé juste derrière la porte mais celle ci n'arrêtait pas de grincer dans un vacarme assourdissant, mal fixée. J'ai donc encore changé de place pour me mettre juste derrière. Les gens devaient me traiter de fou. C'est normal d'essayer d'avoir une bonne place quand on est parti pour 12 heures d'aventures dont 90% passées à bord.

Lac McKenzie

De Noosa, notre camion-baroudeur n'est pas passé par la côte du Great Sandy National Park comme ce que je pensais et à la différence d'autres tours opérateurs. Je suis un peu déçu de ce côté là. Le guide a préféré passer par l'intérieur, contournant le parc sur des kilomètres qui m'ont parus des heures pour rejoindre Rainbow Beach, un des points d'accès pour Fraser Island. A Rainbow Beach pas de visite non plus des falaises aux sables multicolores qu'on n'a même pas aperçues de loin. Faudra donc que demain j'y retourne avec ma voiture, c'est de toute façon sur le chemin pour le nord et Lady Musgrave. Toute le long de la plage de Rainbow Beach c'est une suite de terrains de camping gérés par l'office des parcs, des endroits très basiques où l'on ne trouve que des toilettes sans douche. On peut y camper moyennant un permis à demander à l'entrée, contre 5 dollars. C'est très populaire parmi les jeunes qui viennent camper par milliers entre Noël et le jour de l'an. Il faut dire que l'endroit, sauvage, a de quoi plaire : la tente au bord de l'eau avec une plage qui s'étend sur des kilomètres avec de gros rouleaux pour surfer. Notre guide nous a dit que jusqu'à la semaine dernière c'était encore noir de monde. Ah les vacances scolaires ! Synonyme de mouvements de masse. Je les évite soigneusement où que je voyage pour éviter l'enfer des bouchons, des plages surpeuplées et du bruit partout. 
En France ils parlent de réformer les vacances scolaires d'été, jugées trop longues, mais qu'ils vont zoner comme les autres vacances pour minimiser l'impact sur le tourisme. Les professionnels en ont profité pour demander un étalement du 15 juin au 15 septembre. Je ne sais pas ce qu'il en est, un moment je suivais l'affaire de près car je suis farouchement contre. Mes vacances d'été je les prend avant le 30 juin et après le 1er septembre et j'espère bien que ce créneau restera encore longtemps exempt de vacanciers. C'est la meilleure saison pour explorer les côtes de Méditerranée, les journées sont encore longues, le soleil est là, il fait chaud et il n'y a personne ce qui permet d'avoir en plus des tarifs intéressants.
Pour rejoindre Fraser Isalnd, il y a une espèce de barge qui attend n'importe quel convoi pour traverser. Il n'y a pas d'horaire. Il faut dire que la traversée est très courte, en quelques minutes c'est torché. 
Quand on a mis roue à terre, ou plutôt à sable, c'était marrée haute, aussi nous avons dû rejoindre la piste conçue à cet effet, après avoir un temps roulé dans l'eau parmi les vagues qui venaient déferler sur nous. Ça fait bizarre d'être dans un véhicule terrestre en train de rouler dans la mer. On a subitement l'impression d'être dans un bateau ! Sur la brochure il y avait marqué : «Remember this is a 4WD safari and may not be suitable if pregnant or if you have a bad back » . Malgré mon « bad back » cela ne m'avait pas freiné - il est des choses qu'on se doit de voir quel qu'en soit le prix à payer - me disant que bien souvent ils exagèrent un peu pour éviter toute plainte ultérieure. Eh bien là, pas du tout ! Les pistes de l'intérieur des terres sont une horreur. Il ne faut pas s'attendre à de grand boulevards, ce sont des pistes dans la jungle au travers desquelles le fourgon passe et cogne dans les lianes, roulant sur des racines, tournicotant avec des bosses en veux tu en voilà prises à vive allure. Car on conduit là dessus comme un fou. C'est un engin tout terrain qui ne s'embarrasse pas de précautions de 30 à l'heure, comme moi sur la Western Explorer, il y va franco, à fond la caisse, la vitesse est limitée à 80. 
Central Station
Je me demandais : et si un autre véhicule se pointait dans l'autre sens ? D'ailleurs c'est arrivé plusieurs fois, freinage de folie, les gens scotchés au dossier du siège de devant, une jambe de travers, un bras tordu. Et puis impossible de doubler, les autres véhicules étaient obligés de reculer jusqu'à trouver un point où se mettre à l'écart (bien souvent avec deux roues dans le vide!). Il y avait des téméraires en individuel avec de petits 4x4 que notre chauffeur conseillait de ne pas passer par là en disant que le sable était trop mou et qu'ils allaient s'enliser, bloquant le trafic comme ce qui arrive très fréquemment. Pour ma part, j'avais hâte que ça se termine et qu'on rejoigne la plage pour rouler dessus si je ne voulais pas finir mon voyage en chaise roulante !


On a fini par atteindre 75 Miles Beach, une plage interminable qui se perd à l'horizon des deux côtés dans des brumes marines. Un coin de bout du monde, bordé de dunes, sur la côte est. En fait toute notre exploration de la côte s'est faite de ce côté, c'est là qu'apparemment se trouvent toutes les curiosités. Le programme est le même d'un tour opérateur à l'autre, le mien étant celui - mais pas le seul - qui offre le plus long parcours. On s'est arrêté un moment pour le « morning tea ». Il était temps, je n'avais rien avalé ce matin. 5 heures du matin ce n'est pas une heure pour prendre un petit déjeuner. Dès qu'on a mis le pied dehors on a été assailli par des taons énormes, gros comme des frelons, pas farouches du tout, avec lesquels il faut se battre constamment. Il y en a toujours une bonne demie douzaine à tourner autour de chacun. Je ne compte plus le nombre que j'en ai tués. C'est facile, ils ne s'envolent pas, trop contents d'avoir trouvé un animal à piquer. Je n'en n'avais jamais vu de cette taille. C'est un vrai fléau, j'ai passé le reste de la journée à chaque arrêt à agiter les bras et les jambes dans tous les sens pour éviter tout atterrissage. Malheur à vous si vous restez debout sans bouger !
Après le thé on a repris la circulation sur la plage. C'est drôle de voir les vagues et les dunes défiler dans ce qui semble être un paysage sans fin. Le sable est parfaitement lisse, le fourgon ne grince plus, sauf à quelques passages où des ruisseaux viennent se jeter là, occasionnant quelques soubresauts. Il paraît qu'aux vacances de Noël il y avait tellement de monde que l'on avançait au pas sur la plage, pris dans des bouchons. Je suis bien content d'être ici hors saison. Rapidement nous avons quitté la plage pour s'enfoncer à nouveau dans la jungle pour rejoindre le lac McKenzie, accessible par une piste de sable de 12 kilomètres. Ce lac est le point phare de toutes les excursions et bien souvent le terminus avant le retour, point choisi pour le pique nique barbecue. C'est un lac bordé de sable blanc qui lui confère des couleurs bleu lagon. Il n'est alimenté par aucune source et rien ne s'y échappe ce qui fait que tout ce qui y rentre y reste. 
Eli Creek
Il est pourtant très pur et pour qu'il le reste en dépit de la surfréquentation du site, il y a de grands panneaux invitant les gens à ne pas utiliser de crème solaire ni insecticide et de faire un tour aux toilettes avant d'aller se baigner. Il faut aussi ne pas amener de nourriture ni boissons. Seule l'eau est autorisée. Car l'endroit est patrouillé par de nombreux dingos attirés par le point d'eau pour y trouver des proies faciles et il est rigoureusement interdit de les nourrir ou de les approcher. J'ai lu un peu ce qui était écrit de leurs coutumes, ça a l'air d'être pas commode. Ça vit en bande de 12 et tout est affaire de domination chez eux, les individus soumis ne disposant que des restes des autres et à la condition qu'ils avancent en rampant, les oreilles rabattues et la queue entre les jambes. Ils se battent aussi avec d'autres bandes pour la protection de leur territoire, parfois jusqu'à la mort. Bref domination et guerre, ces bêtes là n'ont rien pour me plaire. 
Quand ils voient un humain ils cherchent aussi à le dominer, principalement les gosses et ceux ci pensent que le dingo veut jouer car cela ressemble à un rituel. Sauf que si un enfant veut y participer il se fait bouffer ! Je n'ai pas vu de dingo mais je me suis baigné, trop vite car j'avais oublié que ma montre était à l'heure de Sydney donc avançant une heure de trop. De toute façon le lac est devenu bondé et rempli de cris, les autres camions de touristes arrivant tous en même temps. Et il y en a des gros, des bus 4x4 en fait, tous de la même compagnie qui en a mis à disposition une bonne demi douzaine. Ils se suivent comme autant de wagons d'un train. Je voulais noter le nom pour vous éviter de prendre cette compagnie mais j'ai oublié. La mienne c'est FraserIsland Nature Tours. 


A 11 heures nous avons continué notre chemin pour Central Station, lieu de notre barbecue niché dans une vallée avec un ruisseau qui se fraye un chemin comme il peut dans la jungle et les fougères, perdu dans les chants d'oiseaux et de criquets qui se mettent à bruisser énergiquement dès qu'un rayon de soleil sort d'un nuage. Il y a des sentiers plus ou moins aménagés pour se balader là dedans, en attendant que notre guide nous prépare le barbecue. C'est la forêt vierge comme j'aime. Ah ce pays ! Quelle merveille, il a tout. Et toujours la nature omniprésente. Pays nouveau et resté presque vierge, dernier territoire encore sous peuplé, l'Australie a tout pour me plaire. Sauf les prix de l'immobilier qui sont ici indécents comme partout ailleurs dans le monde (le moindre truc sur la côte se paye à coup de millions de dollars, c'est l'unité de mesure). Tout le monde serait riche comme Crésus ou est ce moi qui ai perdu la notion de l'argent?
Reflets
Après le barboc, nous avons rejoint la plage pour poursuivre plus au nord, voir 3 autres attractions. La première : the coloured sands, dunes de sable censées avoir 72 couleurs différentes mais dont je n'ai vu que de l'orange sous un soleil à son zénith. Il faut sans doute voir ça en fin de journée. D'ailleurs on n'a fait qu'une pause photo et on est reparti aussi sec. Ce qui est la cas un peu partout sauf au lac où on a eu un peu plus d'une heure. Sinon les pauses se résument à 15 minutes maximum. Je suis toujours le premier à descendre et le dernier à monter, notre guide attendant pour fermer la porte latérale de la cabine, en regardant ses pieds. Il doit en avoir marre d'attendre avec le moteur qui tourne. Je savais que ce serait une journée marathon mais je ne suis pas sûr que j’aurais plus apprécié sur plusieurs jours. J'aime bien en avoir plein la vue. Seul hic, pour le reste de l'après midi, à chaque arrêt j'ai dû me battre à courir pour arriver le premier et faire des photos avec personne autour. Car les autres bus wagons avaient à présent le même itinéraire que nous et nous suivaient de près, déversant des centaines de touristes qui envahissaient tout comme un nuage de criquets en Afrique.
On s'est arrêté aussi au niveau d'une épave très photogénique, le SS Maheno, devenu lieu de curiosité, échoué là depuis 1935 et appartenant à la Nouvelle-Zélande. Sur la plage il y avait un petit avion de tourisme qui nous suivait comme un taon, pour ceux des bus que ça intéresserait de voler quelques minutes pour voir Fraser Island d'en haut. Notre dernier arrêt et dernière possibilité de baignade s'est fait à Eli Creek, un ruisseau d'eau fraîche que l'on peut remonter jusqu'à un niveau qui forme une petite piscine qui s'est vite transformée en parc d'élevage à saumons. J'ai préféré rester à barboter plus en aval jusqu'à ce qu'arrive un gosse obèse et hurleur dont le grand jeu était de faire de hautes enjambées dans l'eau en passant à 20 centimètres de moi pour bien m'éclabousser. La mère, une espèce de truie, regardait faire sans rien dire. Je me suis donc éclipsé de là pour prendre un « afternoon tea », avant de rentrer. Sur le chemin du retour, un dingo nous a accompagné, marchant le long de la plage. On l'a suivi au pas. Il n'avait pas l'air effrayé de notre présence.


 J'ai fait connaissance aujourd'hui avec des français de Nouvelle-Calédonie. Quand ils m'ont demandé ce que j'avais vu, je leur ai raconté mes déboires et ils m'ont dit qu'en effet je n'avais pas eu de chance mais qu'il s'était mis à faire beau dès le jeudi, c'est à dire le lendemain que je sois parti. Et depuis le soleil ne cesse de briller. A ce qu'il disent. C'était tellement pourri que j'ai du mal à le croire. Je ne suis pas le seul à avoir déserté la région, ils ont des amis à eux qui sont aussi partis plus tôt que prévu. Ils étaient à l’Île des Pins au moment où j'y étais, restant au gîte que j'allais squatter. Je les ai donc forcément vus et quand ils m'ont dit leur nom, je me demande même si je n'ai pas discuté avec.


1 commentaire:

  1. "en en louant"

    "Je ne compte plus le nombre que j'en ai tués"

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