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mercredi 11 avril 2012

Perhentian Kecil


Long Beach
La jungle s'est invitée à table au petit déjeuner. Un phasme. Une monstruosité d'une vingtaine de centimètres, comme un bout de bois qui se déplace. Il y des phasmes en France mais de cette taille je n'en avais jamais vu. La bestiole inspirait la curiosité ou l'horreur, les filles ayant plus tendance à pencher pour la dernière option, poussant des cris hystériques quand elle se retrouvaient nez à nez avec. Car le phasme était accroché à une chaise, gesticulant pour avancer plus en hauteur. Il moulinait des pattes avant, à la recherche d'une prise qui lui permettrait de continuer son ascension. Sauf qu'en haut d'une chaise en plastique bleue, c'est terminus. Du coup, il allait voir un peu ailleurs sur le dossier de la chaise, faisant des allées et venues à des endroits où il n’arrêtait pas de passer. Ça a l'air d'avoir très mauvaise mémoire et c'est pas très fute-fute. Aussi, plutôt qu'il s'épuise à essayer de grimper alors qu'il ne peut pas, une fois la galerie bien amusée, j'ai embarqué la chaise pour la plaquer contre un tronc de la même couleur que lui. Il a fait le mort quand je l'ai forcé à débarquer. 
Plus rien ne bougeait, il s'était figé comme une branche, une patte en l'air et la tête de côté. Comme il semblait parti pour rester comme ça des lustres, je suis retourné à mon bungalow pour prendre l'appareil photo. Quand je suis revenu il avait déjà fichu le camp bien haut. Je lui ai sauvé la vie, ou plus modestement permis de retourner à sa vraie nature.
J'étais fin prêt très tôt ce matin, le beau temps était à nouveau de la partie. Ce n'était pas bien évident car sur le coup de 21 heures hier soir ça avait recommencé, durant une bonne partie de la nuit car ce matin les arbres s’égouttaient encore et j'ai à nouveau trouvé le seau à moitié rempli. La lune brillait, c'était bon signe. Car lorsque je me lève sur les coups de 6 heures il fait encore nuit, le jour ne commençant vraiment que vers 7 heures. Je pense que ça va être pire quand je vais être en Thaïlande, c’est plus à l'ouest. A moins qu'il y ait un décalage horaire mais ça m'étonnerait, la Malaise étant située juste en dessous, aussi je vois mal deux pays au même niveau être à deux heures différentes. 
Long Beach
Peu avant la sortie snorkeling, j'ai manifesté mon intention de me rendre à Long Beach sur Perhentian Kecil car de cette plage part un sentier qui traverse l’île et qui me permettrait donc de voir deux plages différentes. Long Beach est aussi, comme son nom l'indique, la plus longue plage de toutes les îles Perhentian et c'est là où se concentrent les hôtels les moins chers, attirant une clientèle de jeunes backpackers venus là pour faire la fête. C'est pour cela que j'ai choisi l'autre île, ayant lu des plaintes de gens qui ne pouvaient pas fermer l’œil en raison de musiques et de hurlements nocturnes. Même s'il n'y a pas de chiens ici, un britannique aviné les remplace avantageusement.
Je pensais comme l'autre jour qu'on me proposerait de monter à bord du bateau de la sortie snorkeling pour me déposer en route. C'est d'ailleurs ce qu'ils ont envisagé dans un premier temps. Sauf que long Beach ne figure pas cette fois sur leur trajet. 
Long Beach
Le verdict est tombé un quart d'heure plus tard, une fois que le groupe a fini d’être briefé par l'anglais qui m'avait indiqué le chemin à suivre dans la jungle autour du Bubbles - que je n'ai jamais emprunté au passage. Le groupe ce matin est monumental, au moins 30 personnes. Tout le gîte est présent. Les gamins des autres jours ont fichu le camp, sans doute la fin des vacances pour eux. Il y a tellement de monde qu'ils ont affrété deux bateaux où les gens font touche touche de la cuisse. J'avais quelques regrets de ne pas avoir profité de cette sortie et d’être venu aux îles Perhentian en ayant pour ainsi dire rien vu de la vie sous marine mais dans ces conditions d'armées de gilets rouges, je suis mieux le cul assis sur une chaise à attendre. De toute façon j'ai oublié mon masque au PIR. Je m'en étais rendu compte rapidement mais j'avais eu la flemme de rebrousser le chemin dans la jungle alors que l'orage menaçait d'éclater à tout moment. Je suis donc dorénavant sans matériel de plongée pour les deux semaines qui me restent. Tant pis, j'en ai bien profité auparavant.

Long Beach

Coral Bay
Il n'y avait plus que moi sur la plage, à attendre un taxi-boat que le gîte avait appelé, me demandant de patienter dix minutes. Sauf que les dix minutes faisaient à présent une demie heure et je commençais à en avoir un peu marre de constater que l'horloge tournait alors que c'est mon dernier jour ici et que j'ai plein de choses à découvrir sur Perhentain Kecil. Ce n'est tout de même pas sorcier de faire venir un bateau taxi, il y en a plein partout. J'y arrive très bien moi même. Je suis donc retourné à la réception leur dire que leur dix minutes étaient largement dépassées. Ils ont regardé sous les arbres pour voir si quelque chose venait. Pas la peine j’en viens, il n'y a rien à l'horizon ! Le type a repris son téléphone rose, tâtonnant dans son répertoire. Il m'a dit que l'autre était en route mais que parfois cela peut prendre du temps. Sinon je n'avais qu'à attendre 11 heures que le bateau du snorkeling soit rentré, ils se feraient alors un plaisir de me conduire à Long Beach ! 
Coral Bay
Je commençais à fulminer, coincé dans ce trou alors que chaque baie dispose d'un taxi-boat sauf ici. Ça n'allait pas du tout, je ne me voyais pas attendre 11 heures, cela faisait déjà une heure que j'attendais. La coupe était pleine, j'ai craqué. J'ai dit au type que j'allais prendre un kayak pour aller dans la baie voisine et que là je me débrouillerais, laissant le kayak en plan et tant pis si je me le fais voler. Il est allé voir la patronne qui lui a dit d'aller voir je ne sais où, qu'il y avait un papier avec les numéros d'urgence. Ils commençaient un peu à se bouger le cul. Juste à ce moment là, le bateau tant attendu est arrivé. Je me suis excusé pour toute ce remue ménage de dernière minute qui ne servait plus à rien et je suis monté dans le bateau, accompagné de deux autres pensionnaires sortis de je ne sais où qui allaient aussi à Long Beach. Et devinez qui conduisait. Le gosse de 10 ans de l'autre fois ! Il connaît bien son métier, il est très courtois et répartit les gens comme il faut dans le bateau pour qu'on ne penche pas d'un côté. Quand tout le monde est installé il demande si tout est bon et si on peut y aller. Il est très gentil et souriant. Par contre il a un peu de mal à dégager le bateau du sable en le poussant. Faudra encore qu'il attende quelques années. En tout cas son avenir est tout tracé !
Romantic Beach
Long Beach n'est pas le truc cacophonique auquel je m'attendais. Certes il y a des hébergements un peu partout mais ils ne sont pas anarchiques et en retrait par rapport à la plage, de sorte qu'ils ne dénaturent pas le paysage. Et quelle plage ! Un long croissant de sable blanc très fin avec pour couronner le tout quelques vagues et même des surfeurs ! Comme la plage est large, il n'y a par contre pas d'ombre. Aussi ils ont planté quelques parasols dans le sable avec des nattes en osier sur lesquelles on peut s'allonger sauf que ce n’est pas gratuit. J'ai parcouru toute la plage, étant arrivé par son extrémité nord qui dispose d'un grand ponton. C’est vers le côté sud qu'on rencontre le plus de vagues. Il y a aussi à cet endroit un resort qui occupe une partie en haut des rochers surplombant la baie. J'ai escaladé ces rochers pour avoir un joli point de vue, avant d'aller me baigner, ne pouvant pas résister plus longtemps à l'appel des vagues. Ça faisait longtemps, la dernière fois c'était à Noosa, et rien que son évocation suffit à me rendre nostalgique. J'ai bien aimé cette partie de mon périple en Australie.
Romantic Beach
Se baigner à Long Beach est un délice que je me suis promis de goûter à nouveau plus tard dans l'après midi. La plage fait comme un plateau, elle tombe assez rapidement dans la mer et on a de l'eau au nombril mais on peut marcher encore comme ça de bonnes dizaines de mètres avant de ne plus avoir pied. C'est pour ça qu'il y a des vagues, la houle étant freinée par ce plateau, plus au large, créant des déferlantes qui viennent rouler sur la plage. Par contre je ne sais pas comment font les surfeurs mais les vagues sont très gentilles, elles sont molles et n'ont aucune force. Je n'ai même pas essayé de me faire propulser par l'une d'entre elles. En tout cas ça m'a bien rafraîchi et j'ai dû me forcer à sortir de là car il me restait encore plein d'endroits à voir.
J'ai regardé un peu la liste des destinations des bateaux taxi sur Small Island, il y en a plus d'une dizaine, avec des criques que j'ai bien envie de découvrir. 
Romantic Beach
Une que je veux absolument voir c'est Romantic Beach, apparemment la mieux de Perhentian Kecil si j'en juge la pub que je peux lire sur les différents tableaux qui proposent des tours de l’île. Romantic Beach est de l'autre côté, dans un endroit où il n'y a rien autour, un peu à la manière de Tutle Beach sur Big Island. Comme je suis un peu ric-rac au niveau de l'argent liquide, j'ai décidé de passer de l'autre côté, au niveau de Coral Bay, à pied et de trouver de là bas un taxi boat, me rapprochant donc pour faire baisser le prix de la course.
Le chemin pour atteindre Coral Bay est très facile, il est en plus pavé. La traversée se fait en à peine dix minutes. Par contre, arrivé côté ouest c'est un peu la déception. Les hébergements sont à touche touche, venant lécher le rivage par dessus une plage large de quelques mètres. C'est beaucoup plus dense de ce côté là. Il vaut donc mieux choisir un hébergement sur Long Beach plutôt qu'à Coral Bay. 
Romantic Beach
En plus, quand on arrive l'impression n'est pas très bonne, le chemin passe au milieu d'un resort en construction, formant un couloir de béton, de balustrades et de sacs en tout genre. C'est Bagdad ! Rien de bien sauvage. Il y a un chemin qui continue pour rejoindre le seul village de toutes les îles Perhentian. Je l'ai emprunté un instant espérant trouver au passage quelques criques secrètes mais j'ai fini par rebrousser chemin. Il n'y avait rien, le sentier évoluant dans une espèce de jungle à moustiques en bordure de mer, que l'on ne voit du reste jamais et dont le rivage n'est constitué que de rochers.
Chemin faisant, comme il était déjà midi et demie, je me suis arrêté dans une gargote dont les tables avaient les pieds dans l'eau. Peut être un tord boyau mais il semblerait que de ce côté là je sois immunisé, si bien que j'ai même demandé un jus de pastèque avec des glaçons. De toute façon l'eau est la même dans toutes les îles, les resorts étant reliés les uns aux autres par ces fameuses canalisations qui courent où elles peuvent. Ce qui est dommage quand je pars en expédition comme ça c’est que je loupe le déjeuner au Bubbles car je suis là bas en pension complète. Je paye donc le déjeuner deux fois, c'est un peu bête. C'est pour ça d'ailleurs que les gens ne bougent pas de là bas, c'est un moyen de rendre les gens captifs. Il faut de la motivation comme moi pour faire fi de ça et décider de s'extirper.

Romantic Beach

Romantic Beach
Après manger, j'ai trouvé un bateau pour m'amener à Romantic Beach. J'ai demandé à ce qu'il vienne me chercher une heure et demie plus tard. La plage est une mince bande de sable coincée entre un lagon d'une couleur étincelante et des rochers. Il n'y a de l'ombre qu'à deux endroits, sous deux arbres et les coins étaient déjà pourvus. Il n'y a pas foule : une famille avec ses deux enfants, deux filles qui n’arrêtent pas de se prendre en photo en courbant la chute des reins et un couple de kayakistes. En dessous de chaque arbre on trouve des guirlandes de coquillages qui s'entrechoquent sous l'effet du vent. Ça fait très hippie, comme ces petites tours de galets qu'on trouve aussi parfois sur certaines plages de Méditerranée. Avant d'aller prendre un nouveau bain, j'ai placé mon sac sous un rocher, seul coin d'ombre encore libre. Je me demandais où j'allais me mettre en sortant de l'eau, le soleil étant mortel à cette heure là. Juste quand je pensais à ça, le couple au kayak a commencé à remballer ses affaires. 
C'est la sieste!
Ils étaient donc là juste pour une escale. Je me suis empêché de prendre possession des lieux et j'ai bien fait car au moment où je prenais mon sac, un bateau s’est mis à foncer sur la plage avec à son bord de nouveaux occupants. Je me suis mis en plein milieu, en travers sous l'arbre, de sorte qu'il n'était pas possible que d'autres personnes s'y installent, sauf amateurs de plages de Côte d'Azur !
J'ai fait une petite sieste, il me restait une vingtaine de minutes avant que le bateau ne vienne me chercher. Je n'ai pas regretté de partir si tôt (15 heures) car à présent la plage était pleine de plongeurs venus là en escale et de groupes qui débarquaient de bateaux en criant, dont l'un d'eux s'était arrêté juste à côté de ma serviette. Un conseil si vous voulez visiter cette plage : elle n'est romantique qu'entre midi et deux, quand tout le monde est en train de manger. Après on devrait l'appeler Panic Beach ! J’avais encore un autre endroit que je voulais voir : D Lagoon, de l'autre côté à nouveau, au nord de Long Beach. 
Cette fois rien ne me poussait à m'y rendre si ce n'est le nom. S'il y a « lagon » dans le nom c'est qu'il doit y avoir une raison. Mais avant, comme promis, une fois rendu sur Long Beach, j'ai pris un nouveau bain dans les vagues. J'étais tiraillé entre l'envie d'explorer l’île de fond en comble et le bonheur de nager dans cette plage aux gentils petits rouleaux. Finalement, j'ai décidé de sortir de là et d'aller à D Lagoon. Mais j'ai regretté, dès que j'ai vu la dite plage. Il n'y a aucun lagon, c’est en fait le nom d'un resort qui se trouve là. La plage est minuscule, jonchée de coraux morts, plongée dans l'ombre et l'eau y est trouble ! Du coup j'ai demandé au bateau qu'il vienne me prendre à 17 heures, 45 minutes plus tard.
En attendant je suis passé de l'autre côté à nouveau , par le biais d'un petit chemin qui traverse une jungle très jolie pour rejoindre deux criques. Le sol est encore tout trempé, couvert de feuilles mortes qui font piscine à grenouilles. 
La jungle est si touffue qu'à mon avis le sol ne sèche jamais. J’avais aussi en tête ce qu'un type du personnel du Bubbles m'avait dit ce matin après m'avoir demandé ce que j'allais faire aujourd'hui. A savoir que l’île est truffée de cobras mortels et d'araignées tout aussi venimeuses. Avec mes pauvres tongs, trébuchant sans cesse sur des racines ou les pieds disparaissant sous les feuilles, je ne faisais pas le malin. Un cobra ça vit où ? Sur le sol ou bien ça se jette des arbres ? Dans le doute j'ai évité de regarder en l'air. Si on commence à penser à ça, on ne fait plus rien !
Arrivé de l'autre côté, la plage est d'une sauvagerie trop sauvage. A savoir que c'est un grand mélange de tout sans unité structurelle. Des espèces de dunes de coraux morts, du sable grossier, des rochers et de l'au trouble qui ne permet pas de savoir où l'on pose un pied. Et c'est bien dommage car au moment où je suis monté sur un rocher pour prendre une photo j'ai aperçu un requin qui défilait le long de la plage. Ça ne m'a pas empêché de me baigner une fois redescendu, mais il fallait voir ça. J'étais assis dans l'eau, les pieds en l'air comme un scarabée retourné pour éviter que le requin ne soit alerté par quelque chose qui frétille. Et je m'aspergeais d'eau, déséquilibré et retourné par chaque vague. C'était vraiment parce que j'avais chaud ! Ce petit jeu qui ne rimait à rien n'a duré que quelques minutes, je m'en suis retourné, pour aller me baigner à l'ombre à D Lagoon, en attendant que le bateau passe me chercher. L'eau était tout aussi trouble mais en revanche je n'avais pas vu de requin. C'était plus psychologique qu'autre chose.
Turthe Beach, mais sur Perhentian Kecil cette fois
J'ai croisé sur la plage mes voisins de bungalow du Bubbles, un jeune couple d'allemands. Il y avait quelque chose de bizarre avec le bateau qui devait passer me prendre. D'ordinaire ils ne font payer que lors du trajet du retour, celui là m'avait fait payer le trajet simple en m'y conduisant et je n'avais donc aucune certitude qu'il reviendrait me chercher, à part si l'envie lui prenait de faire plus d’argent. Il était déjà 17h15 et aucune trace du bateau. Les allemands se sont mis en mouvement et je les ai interceptés au passage pour savoir où ils allaient. Ils rentraient comme moi au Bubbles, c'était inespéré, je me suis donc joint à eux. C'était ma dernière chance, sinon j'aurais été coincé au D Lagoon qui ne dispose pas de taxi-boat à l'instar du Bubbles. Un peu avant d'arriver à Long Beach j'ai vu une barcasse arriver vers nous. J'avais envie de disparaître au fond du bateau. Ce devait être l'autre qui devait venir me chercher. Ça ne sa fait pas de donner rendez vous à quelqu'un et de monter dans un autre bateau. Il use de l'essence pour rien et ça me gène. Déjà qu'avec le tarif de la course il ne doit pas faire beaucoup de bénéfice... Mais le capitaine de la barque était quelqu'un d'autre. Je me suis donc consolé avec le fait que ce ne devait pas être pour moi, bien qu'il ne restait plus personne à attendre sur la plage. Plus probablement le précédent capitaine avait dû demander à un autre de venir me chercher. Mais tant qu'on n'en a pas la preuve et que l'on n’est pas reconnu, l'honneur est sauf !


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