Ce matin le temps
oscillait entre ciel bleu et nuages gris sans qu'on sache quelle
décision il allait prendre. J'ai choisi pour lui, j'ai décidé
qu'il ferait beau et j'en ai donc profité pour laver le linge sale
qui ne pouvait plus attendre. Je suis ensuite allé mettre ça à
sécher, cherchant un coin du resort au soleil. Ce n'est pas facile,
car il est tellement niché dans la jungle qu'il n'y a aucun endroit
qui reçoit le soleil toute la journée. A part sur la plage. Mais je
ne voyais pas y suspendre mes culottes ! J'ai donc tout mis sur
un fil qui traînait, juste à côté du centre de plongée. A mon
avis, je pense plutôt que c’est destiné à faire sécher les
combinaisons. Le fil n'était pas au soleil mais n'allait pas tarder
à l’être sitôt le soleil sorti de la cime des arbres. Il faut
lui laisser le temps. Pendant ce temps j'ai pris le petit déjeuner.
Il a fallu se rendre à une évidence : encore une fois il ne
ferait pas beau aujourd'hui. Une marche sur la plage l'a confirmé,
c'était gris-noir de tous côtés.
Avec mon linge j'avais l'air
malin. Pourtant il fallait absolument qu'il sèche. J'ai eu un éclair
de génie, avec toute cette humidité, comment fait le resort pour
sécher les draps avec toutes les allées et venues ? Je suis
allé leur demander s'ils n'avaient pas un sèche linge, l'air penaud
avec mes vêtements humides sur le bras comme sur un porte serviette.
Bingo ils en ont bien un et se proposent de me les faire sécher
« free of charge ». C'est sympa. C’est la matrone qui
me les a pris, fourguant le tout sous le comptoir, dans une espèce
de corbeille à papier. Elle est ensuite partie vaquer à ses
occupations. Et si elle oubliait ? Avec ma demande inhabituelle
et une corbeille avec un couvercle cachée, j'avais un peu peur que
ça passe à la trappe.
On ne change pas l'emploi
du temps, je me suis remis sur l'ordinateur. Il y a un truc qui me
turlupine, ce sont mes derniers jours avant de rentrer, du 27 au 29.
Je suis censé les passer à Singapour mais ça ne me dit rien qui
vaille. Rentrer plus tôt ? Certainement pas, c'est le week-end
et il y a des risques que des voisins à Paris fassent la fête. Je
préfère encore être coincé à Singapour. Le problème si j'y
reste c'est que tout ce que je trouve est très cher. J'avais obtenu
un super prix la dernière fois à l'aéroport, presque du -50% sans
doute parce que j'avais demandé une chambre de suite et que face à
un invendu, il vaut mieux brader que n'avoir personne. Du coup je
compte réitérer la chose en rentrant le 27. Mais pas sûr que j'ai
autant de chance, ce sera vendredi soir. Un moment je comptais aller
ailleurs pour ces deux jours mais les billets restent chers et les
destinations pas très intéressantes. Jakarta par exemple est une
jungle urbaine abominable d'après ce que j'en ai lu. Par contre j'ai
un dépliant que j'ai chopé je ne sais où, sur l'état de Johor, le
plus proche de Singapour.
Et il y a une carte où figure un archipel.
Renseignement pris ce matin sur internet, c'est à deux heures de
route de Singapour et même si les îles sont moins belles que sa
cousine toute proche Tioman (que j'ai loupée je le rappelle suite à
une annulation de vol), ça reste quand même des îles avec une
plage et des cocotiers. Mieux que du béton à Singapour et des
magasins ouverts 24 heures sur 24 (Singapour s'en est fait la
spécialité et les gens accourent de partout pour consommer non
stop). J'ai contacté un resort, ils ont de la place et me demandent
à peine 100 euros pour 2 nuits pension complète. C'est tentant.
Sauf que j'ai lu aussi que ces îles sont envahies le week-end par
les singapouriens qui fuient le stress de la semaine pour s'y
ressourcer avec gamins mal élevés sous le bras. Ce n'est pas moi
qui le dit, c'est Trip Advisor pour un autre resort sur la même île.
Alors je ne sais pas quoi faire. Terminer en beauté sur une île
avant de rentrer ou me réadapter à la civilisation à Singapour ?
Car les îles, ce n'est pas que j'en ai un peu marre mais j'ai envie
d'autre chose. Là j'ai besoin de montagne, de relief et de
randonnées. Pour mon prochain grand voyage j'essaierai de mêler
plus les paysages différents, sinon on finit par se lasser. C'est la
nature humaine, il faut toujours du nouveau. Je suis sûr qu'au
paradis on s'y emmerde !
Perdu dans ces
réflexions, j'ai tout coupé et me suis accordé une balade sur la
plage à la faveur de rayons de soleil de plus en plus présents. Sur
la plage j'ai eu la confirmation : le ciel bleu se faisait de
plus en plus présent, laissant présager d'une belle journée.
Enfin ! Sauf qu'il était 11 heures et donc trop tard pour
partir en exploration sur Perhentian Kecil. J'ai posé ma serviette
sur le sable mouillé, à l'ombre, faisant une sieste avant le
déjeuner. Ces derniers jours sous un temps affreux m'ont enlevé
tout enthousiasme. Je traîne des pieds et j'ai l'impression de ne
plus profiter. Va falloir que je me reprenne en main. Quoi de mieux
que de partir en exploration ? Oui, mais laquelle ? Au
restaurant il y avait bien un panneau affichant un tour de snorkeling
à 14 heures, sans doute celui de ce matin qui avait dû être annulé
en raison du temps. Mais il était 13 heures, j’avais fini de
manger et je n'avais pas envie de rester à poiroter une heure alors
que les meilleures photos, c’est maintenant qu'on peut les faire.
Après, le bleu de l'eau devient moins beau. Je me suis soudain
souvenu qu'ils avaient des kayaks. Ils les louent à l’heure pour
10 ringgits. Si j'en prends un pour 4 heures, ça me fait 10 euros,
ça reste raisonnable. L'affaire était entendue, j'allais faire ça.
Quoi de mieux pour me rebooster ? Je sentais l'excitation monter
en moi, à l'idée de retrouver les sensations que j'avais éprouvées
à Palau. En plus, chaque fois que je rentre de Teluk Dalam, j'ai
repéré une petite plage avant d'arriver à la baie du Bubbles qui
ne demande qu'à ce que j'y pose le pied !
J'ai hérité d'un kayak
deux places, un « close-shell ». C'est comme ça qu'ils
les appellent. C'est une coque fermée dans laquelle on s'assoit pour
ne plus en ressortir. On est coincé là dedans sans dossier pour le
dos, je préfère les kayaks ouverts. Par contre il semblerait que
les kayaks fermés avancent plus vite, j'arrive à filer malgré des
coups de pagaie peu énergiques. Sorti de la plage, quelle direction
prendre ? A droite c'est vers Teluk Dalam, à gauche je ne sais
pas, il y a un cap derrière lequel on voit Redang dépasser au fond.
Peut être que de l'autre côté il y a des criques paradisiaques.
J'ai donc pris à gauche. Pas pour très longtemps car une fois
dépassé le cap on n’est plus du tout à l'abri, l’île est même
terminée et on se trouve en pleine mer de Chine qui dessine de beaux
creux. Je flottais là dessus comme un bouchon, ne contrôlant pas
grand chose alors que les vagues venaient s’écraser sur les
rochers et semblaient m'y attirer. Avec mon kayak fermé j’avais
surtout peur qu'il ne prenne l'eau. Car contrairement à un modèle
ouvert qui a des trous pour que l'eau s’évacue, celui là n'a
rien. Ça se remplit donc d'eau comme une baignoire jusqu'à ce qu'on
coule ! Je ne tenais pas tellement à tester. J'ai donc fait
demi tour.
De l'autre côté c'est
bien plus paisible, on est abrité du vent et c'est plein de petites
criques délicieuses dont je suis tombé sous le charme de l'une
d'entre elles, avec ses cocotiers très hauts qui émergent d'arbres
plus bas qui offrent de l'ombre et de la fraîcheur. L'eau a une
belle couleur, le sable blanc y est fin. Je me rends compte que ces
petites plages qui ont l'air de rien sont très sympas, nichées
entre des gros rochers dodus qu'on peut escalader. Ça casse un peu
la rectitude des grandes plages de sable. Ici tout se mêle, jungle,
plage, rochers. C'est très sauvage et c'est propre, je n'ai trouvé
qu'un pochon de bonbons en train de flotter. Je l'ai jeté loin
derrière pour qu'il ne retourne jamais à la mer. Quelques mètres
plus loin il y a une autre plage avec une source d'eau fraîche. On y
trouve aussi un camp avec une dizaine de tentes, déserté pour la
journée. Je ne sais pas où sont passés les occupants. Il y a une
banderole qui indique que c'est un événement qui dure plusieurs
jours et dont le slogan est «Back to nature ». Sans doute une
association. Juste en face se trouvent 3 ou 4 gros bateaux de pêche
armés de long bras avec de grosses ampoules comme des ventouses sur
toute leur longueur. Des bateaux de pèche de nuit. Il paraît que
les poissons sont attirés par la lumière, comme les papillons, ce
qui rend les prises faciles.
Je suis retourné sous
mes cocotiers, en alternant siestes et bains sur ma plage privée où
personne n'est venu me voir à part un gros aigle de mer rayé noir
et blanc. En plus le coin est parfaitement exposé à l'ouest ce qui
fait que j'ai pu en profiter jusqu'à la fin, contrairement à la
plage du Bubbles qui se trouve plongée dans l'ombre dès 16h30. J'ai
été extirpé de ma bulle de bien être plusieurs fois par le
tonnerre qui grondait mais les orages restaient cantonnées à la
côte de la péninsule, sans déborder pour une fois vers les îles.
Le beau temps ne tenait qu'à un fil ! Finalement je suis rentré
pour 18 heures, croisant au passage un bateau chargé de nouveaux
arrivants pour le Bubbles. Je me rends compte qu'il va falloir que je
me prépare au retour si je veux ne pas trop souffrir du décalage
horaire. Je commence dors et déjà à me coucher plus tard après
avoir regardé un épisode de Columbo pour faire durer la soirée,
m'amenant à me coucher vers 23 heures. Il faut ça sinon mon père
chez qui je vais passer quelques jours en rentrant va me maudire si
je me lève en pleine nuit, frais comme un gardon ! Après 7
mois passés plus ou moins sans trop de décalage horaire d'un pays à
l'autre, je sens que la réadaptation à un rythme français risque
d’être dure. Je n'avais pas pensé à cela...
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