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mercredi 7 décembre 2011

Doubtful Sound

Lac Manapouri

J'étais sur le pied de guerre ce matin, attendant avec impatience l'excursion à Doubtful Sound. La compagnie que j'ai choisie est Fiordland Expeditions. Il y en a 3 qui proposent des croisières avec nuit à bord et après un petit tour sur le net, c’est celui ci qui était le moins cher compte tenu qu'il dispose de cabines qui peuvent être partagées. Et surtout c'est un petit bateau qui ne peut emporter que 14 personnes. Nous sommes 8 de la partie : un couple australien, un couple canadien, un couple anglo-hollandais, un allemand et moi. Le monde entier se presse en Nouvelle-Zélande pour découvrir ses merveilles !
Doubtful Sound est un fjord plus difficile d'accès que Milford Sound.
Il faut d'abord traverser le lac Manapouri, puis prendre un bus qui attend de l'autre côté (au milieu de nul part car il n'y a aucun village alentour) afin de passer par dessus une montagne avant d'arriver au fjord. Bref, il se mérite. Il est aussi plus sauvage et moins exploité que Milford. Il est sur le Top 2 des sites à voir en Nouvelle-Zélande, tout juste derrière Milford Sound. Je ne pense donc pas être déçu. D'autant plus que le soleil perce entre quelques nuages ce matin et que le bulletin météo affiché sur le quai du lac annonce un soleil radieux pour les prochains jours. Chic ! J'aurai comme ça eu les deux : un fjord dans la brume, un autre en plein soleil.
Pour la première partie, on partage le bateau avec des gens de Real Journeys, un autre excursionniste qui a de beaucoup plus gros moyens et qui draine plus de monde, en raison des ses publicités omniprésentes en gros dans toutes les brochures d'information. Pour trouver Fiordland Expeditions, ça a été un pur hasard : le jour où j'ai réservé à l'I-Site de Twizel la sortie sur le lac Tasman, j'avais aussi vu cette affiche et l'avait emportée pour une lecture ultérieure. Je savais déjà que je voulais faire les Doubtful et de préférence sur 2 jours pour goûter au calme et à la sérénité ambiante en étant perdu dans la nature au fond d'un fjord sauvage et mystérieux à l'heure où le soleil se couche et qu'on n'entend plus que de drôles de bruits. J'avais deux adresses de sites qui faisaient ça, celui là était la troisième. Je n'ai jamais vu de pub pour Fiordland Expeditions ailleurs.
Doubtful Sound, depuis Wimot Pass
La traversée du lac s'accompagne de boissons chaudes en libre service et c'est sur le pont supérieur du bateau que j'ai pris place ma tasse de thé à la main. Nous avons levé l'ancre vers 9h30. L'aventure commence déjà, le lac est somptueux avec ses montagnes enneigées derrière. On dirait déjà qu'on est dans un fjord. Le lac Manapouri est considéré comme le lac le plus beau et le plus charmant de Nouvelle-Zélande. Il ne failli pas à sa réputation ! Déjà j'étais tombé sous son charme sur une carte postale que j'avais vue il y a de nombreux jours, j'ai retrouvé son nom inscrit sur mon calepin. Le lac possède plein d'îles désertes mais boisées (normal il est dans le parc national du Fiordland), 34 pour être précis, de plages et de bras de mer. C'est un ancien lac glaciaire, le cinquième plus grand de Nouvelle-Zélande et il est très profond (444 mètres), le second de par sa profondeur.
Notre bateau à Deep Cove
Au bout du lac se trouve une centrale électrique dont on ne voit que les câbles à haute tension en partir. Elle ne repose pas sur un barrage, du coup je me demandais bien comment elle fonctionnait. Capte-t-elle l'eau d'une cascade ? La solution s'est fait connaître par la lecture de panneaux d'information qui expliquent l'origine et le fonctionnement de la centrale. Je ne pensais pas qu'un tel système existait de par le monde mais il est ingénieux : l'électricité est en fait produite à 176 mètres sous le niveau du lac dans une centrale souterraine creusée dans le granite. La puissance est émise par des canaux qui ont été creusés dans la roche et qui siphonnent le lac vers la mer dont le niveau est plus bas. Ça forme donc un gigantesque réseau de conduites d'eaux souterraines avec des turbines au bout. C’est un truc de fou ! D'ailleurs la centrale se visite, on peut descendre sous terre jusqu'à la salle des machines, mais c'est aune autre expédition et je suis plus intéressé par le le fjord que par les prouesses technologiques.
Maria nous souhaite la bienvenue
Pour la deuxième partie de la balade, un bus nous attendait qui est parti à l'assaut de la montagne par Wimot Pass. Le paysage est à tomber, le chemin caillouteux coupe une forêt épaisse dont on ne peut même pas voir l'intérieur tellement c'est bourré de végétation. Le chauffeur nous a même dit que si on essayait de rentrer dedans, au bout de 20 mètres par rapport au chemin, on peut être sûr d'être perdu, aucun repère n'étant possible. C'est le royaume du kiwi. Il paraît qu'il y en a plein par là. Enfin, plein, au sens où on le rencontre plus là qu'ailleurs. Et le chauffeur de demander s'il y a des australiens dans le bus. Le pauvre couple australien valeureux lève alors la main timidement et le chauffeur leur lance : « Thanks for the possums, we did really need them ! ». Ce qui est étonnant c'est qu'ils soient protégés en Australie alors qu'ici ils sont classés fléau national derrière les furets (« stoats », je ne sais pas si la traduction est correcte). 
Mon lit c'est celui à gauche en haut. Alors, la vue?
Chaque fois que je fais une excursion quelque part orientée nature j'ai toujours droit au commentaire sur les pestes de Nouvelle-Zélande. C'est comme ça qu'ils appellent les opposums et les furets. On sent leur désarroi et leur impuissance et on comprend qu'ils en veuillent aux conneries faites par leurs ancêtres lorsqu'ils ont emmené avec eux les furets et les rats. Ces bestioles sont en train de détruire ce que la nature a mis des millions d'années à créer sur une île qui était jusque là préservée, sans prédateur pour les oiseaux, à tel point qu'ils se sont mis à nidifier sur le sol et à perdre leurs ailes à l'instar du kiwi. Et en l'espace de quelques siècles c'est l'hécatombe. Quel désastre !
Après être passé par dessus la montagne, au niveau du col de Wimot Pass, une vue à couper le souffle fait sortir des « wouah » et des cris de bonheur de tout le monde. Le bus s'arrête là et c'est la bousculade pour sortir prendre une photo. Moi je suis comme la vénus de Milo : les bras m'en tombent ! 
Moment de bonheur dans le fjord...
Le fjord s'ouvre à nous en contrebas, enchâssé entre de hautes montagnes dont les sommets sont encore enneigés pour quelques unes. Nous sommes dans la carte postale de Doubtful Sound qu'on peut voir partout pour attirer le chaland. C'est le bonheur total. Après avoir vu ça, je peux mourir ! Le bus continue ensuite sa route jusqu'à Deep Cove, le début du fjord. Le fjord de Doubtful Sound est le second plus grand de Nouvelle-Zélande. Pour se faire une idée, Deep Cove se trouve à 40 kilomètres de la mer. Le fjord est 3 fois plus grand que celui de Milford Sound et sa surface est aussi 10 fois plus grande, grâce à de nombreux bras qui en partent et qui forment aussi de nouveaux fjords.
A Deep Cove nous attendent deux jeunes kiwis, Sean et Maria sur le bateau Tutoko II. C'est un petit bateau qui fait penser à un bateau de pèche. 
On est bien en mer!
Les couples prennent place dans leur cabines tandis que l'allemand et moi nous nous retrouvons à l'étage, dans la continuité du pont supérieur, juste au dessus du poste de pilotage où l'on trouve une cabine avec 6 lits. Ça va, partager une cabine à 2 quand c'est prévu pour 6, on ne risque pas de se battre pour avoir une place qui nous convienne ! L'avent de la cabine s'ouvre en baie arrondie sur la proue du navire et sur le fjord. La vue est magnifique et on est mieux là que dans les cabines pour les couples, bien plus chères et qui ne disposent que de hublot. Ils ont bien la douche dans la cabine alors que la nôtre est en bas à l'arrière mais qu'est ce qu'on en a à faire ?
Tandis que le bateau lâche ses amarres et la civilisation pour 12 heures, le déjeuner est déjà prêt. Car oui, il est déjà plus de midi. Au menu : des pâtes à la crème gratinées au poisson. C'était très bon, j'en ai redemandé une deuxième ration. Maria nous a demandé si certains suivaient des régimes ou avaient des allergies. Elle a mentionné des repas à base de poisson et de langouste que l'on pêcherait en route. Je suis allé la voir après le repas, je ne voulais me faire remarquer devant tout le monde à peine arrivé, pour lui signifier de m'oublier pour le coup de la langouste. Je luis ai dit que je n'aimais pas ça. Peut être est ce un crime que de ne pas y goûter mais je laisse ma part à quelqu'un d'autre qui appréciera sûrement mieux que moi !



A sa place j'aurais déjà un torticolis!
Après le déjeuner nous sommes partis à l'embouchure de Doubtful Sound, où nous avons tenté de voir des pingouins en scrutant des rochers. Alors qu'on avait abandonné la partie, on en a vu un qui faisait sa toilette debout sur un rocher. Plus loin ce sont des dauphins qui jouaient entre eux mais qui n'ont pas voulu nous rejoindre pour patrouiller autour du bateau comme ceux de White Island. Dommage. Le bateau s'arrêtait un peu partout, récupérer des casiers qu'il avait semé la veille avec du poisson à l'intérieur. Et les casiers contenaient des langoustes qui étaient venues se piéger là dedans. Dans le premier casier il y avait même un requin qu'on a relâché. Sinon on doit mesurer les langoustes, si elles sont trop petites elles doivent être relâchées par dessus bord sinon elles finissent dans le seau. 
Sean et un requin
Celles qu'on libérait, après un moment de flottement le temps qu'elles réalisent qu'elles avaient retrouvé leur liberté, filaient comme une fusée d'un coup de queue énergique vers les profondeurs insondables du fjord. Les plus grosses se débattaient quant à elles dans le seau, entassées les unes sur les autres, et donnant des coups de queue pour essayer de s'extirper de là. Je voyais leurs yeux bouger et me regarder, j'avais envie d'en prendre une quand les autres avaient le dos tourner et de la relâcher.
A l'embouchure du fjord on s'est arrêté pour l'activité pêche. Il y avait une canne pour chaque personne et Maria m'en a tendu une que j'ai saisie. Tout le monde s'amusait avec sa canne, moi j'avais l'impression d'être à la foire à essayer de pêcher un canard en plastique. L'équipage nous a mis un bout de salami en guise d'hameçon, il paraît que les poissons adorent ça. Et on a eu un cours de pêche, comment dévider la bobine, mouliner et maximiser les chances de prise. 
C'était intéressant. Jusqu'à ce que je vois Sean qui faisait prises sur prises. Je crois que la pêche ce n'est pas mon truc. Pour tuer les poissons, il leur enfonçait les doigts dans les ouïes pour leur en extraire les branchies. La pauvre bête agonisait ensuite dans un saut dans un filet de sang pendant 15 minutes. On l'entendait se débattre. Les autres aussi n'ont pas tardé à chopper des poissons. Statistiquement ça allait bientôt être mon tour. Pendant ce temps je priais pour que les poissons évitent ma ligne, ne voulant pas participer à ce carnage. Je crois que je vais virer végétarien, déjà que je le suis à moitié. Ou alors il vaut mieux ne pas voir ça et les avoir tout prêts en filets tout carrés ! On va me dire que c'est stupide, que ce n'est qu'un poisson idiot. Et alors, en quoi le fait qu'il soit plus bête lui interdit le droit de vivre? Ça saigne comme nous et ils sont heureux de vivre dans leurs fjords. Et s'ils doivent être tués, eh bien je préfère que ce soit par des phoques ou des lions de mer qui en ont bien plus besoin que moi.
Au bout d'un moment, comme l'heure tournait, je suis allé voir Maria pour savoir si les kayaks étaient pour aujourd'hui. Il était déjà plus de 17 heures et je rêvais de faire du kayak le long du rivage pour voir cette forêt vierge de plus près. Tout le monde a remonté sa ligne, moi j'avais arrêté déjà depuis 15 minutes. Je crois qu'on n'est que deux parmi ceux qui péchaient à ne rien avoir pris. Il y en avait une, l'australienne, qui a passé l'après midi dans sa cabine et en est sortie titubante, vaseuse et le visage cramoisi. Elle avait essayé d'y trouver un peu d'air frais et de tranquillité à cause du bateau qui tanguait et la rendait malade, visiblement ça n'avait pas trop marché ! Je n'osais pas lui parler, de peur que le fait d'ouvrir la bouche pour me répondre ne la fasse me vomir dessus !
J'ai été le premier à prendre place dans un kayak et le premier à rentrer aussi ! Tant que je pagayais ça allait mais alors que je m'arrêtais pour prendre quelques photos, j'ai été assailli par ces foutus moucherons qui ont rappliqué en nombre et qui étaient très voraces. Depuis le bateau ils me voyaient faire de grands gestes essayant de les chasser des mains et des bras. Au final j'ai dû pagayer à toute vitesse pour essayer de les semer ! Ces moucherons suceurs sont en fait ce qu'ils appellent incorrectement « sandflies ». Les mouches de sable sont un autre fléau mais des tropiques et sont minuscules alors que celles là sont bien visibles. Leur vrai nom est « blackfly ». La confusion vient de James Cook qui fut dévoré dans Dusky Sound, le fjord d'à côté, et leur donna ce nom là, sans doute par allusion aux vraies mouches de sable qu'il avait rencontrées auparavant dans les îles. Et le nom resta. Si vous vous voulez en savoir plus sur cette charmante bestiole, elle répond au doux nom de Austrosimulium ungulatum ou Austrosimulium australense. D'après leur nom il semblerait que ce soit endémique à ici. Et tant mieux, je les leur laisse de bon cœur !

Bradshaw Sound

Le bateau est resté là pour la nuit, au bout d'un des bras de Doubtful Sound, au fond de Bradshaw Sound. Comme la porte de notre cabine était ouverte à tous les vents depuis qu'on était monté sur le bateau, je suis allé la fermer bien vite une fois rentré du kayak. J'ai passé une bonne demie heure à les tuer avec une feuille de papier pliée en quatre qui à présent est noire, non pas d'encre, mais de moucherons écrasés. J'ai bien dû en tuer une centaine, ce sera ça de moins qui nous tirera le sang ! J'ai donné la consigne à David, l'allemand, qui continuait à faire du kayak, de bien fermer la porte de la cabine quand il rentrerait lui expliquant que l'endroit était infesté de moucherons. Il avait l'air immunisé car il continuait à pagayer allègrement, et plus encore, pendant que je me douchais (enfin, ma première douche en 7 jours, c'est pas du luxe!), il s'est amusé à sauter par trois reprises dans la baie depuis le toit du bateau. Un fou ! 
L'eau est en général à 11 degrés et peine à monter à 15 au mieux de sa forme, sans doute dans un mois ou deux. Sean nous a même confié que l'hiver il y avait de la neige et de la glace qui s'accumulait aux extrémités des fjords. Quand on était arrivé au bateau et que Maria nous avait détaillé les activités possibles pour la journée, j’avais crû qu'elle plaisantait quand elle avait demandé si certains voulaient se baigner ; manifestement non, car elle aussi est allée barboter sans que personne ne la pousse! Moi j'attendrai 2 jours et d'être aux Îles Fidji !
Sean et Maria sont en fait un jeune couple, c'est l'australienne qui a posé la question, les sentant proches l'un de l'autre, du même ages, très natures, sympathiques et tous deux très beaux. Ils ont un job en or et en sont très contents. Il se sentent très chanceux d'avoir pu obtenir ce job et de pouvoir travailler ensemble. Car en général les employeurs n'aiment pas embaucher des couples. On leur a demandé quel était leur rythme de travail, s'ils avaient des jours de repos, Sean nous a répondu que ce n'était pas un travail et que c'est pour cela qu'ils étaient là, qu'ils appréciaient chaque journée et reconnaissaient la chance qu'ils avaient de pouvoir vivre à demeure dans un endroit pareil. 
Car lorsqu'une excursion est finie, une autre commence. Tout est bien rodé, tous les jours ils se font approvisionner de produits par le bus qui amène des glacières, le reste ils le prennent dans le fjord, et quand le tour est fini, ils font le plein d'eau et de carburant à Deep Cove et c'est reparti pour un tour. Le linge est lavé et séché directement sur le bateau (il y a des machines), pendant l'heure ou deux qu'ils ont de battement entre deux groupes. Ils ne savent pas d'un jour l'autre ce qu'ils feront le lendemain, ça dépend de la radio quand Fiordland Expeditions les informe des prochaines arrivées. A la saison morte, ils rentrent sur la terre ferme. Ils vivent dans un bus aménagé et nous ont confié qu'alors que certains rêvaient d'avoir maison et jardin, eux étaient très heureux de vivre ainsi, entre un bateau, dans un des plus bel endroit sur terre et un bus camping-car. 
J'envie leur style de vie. On les sent vraiment heureux et épanouis, tranquilles. Ils ont trouvé leur voie, ils n'ont personne pour les embêter, que des clients à satisfaire, ce qu'ils font très bien. Maria est une très bonne cuisinière, dans le passé d'ailleurs c'était son boulot mais elle n'aimait pas être en cuisine et ne pas voir les réactions des gens faces à ses plats. Alors que là elle voit tout de suite les mines réjouies des convives, du coup ça lui apporte une satisfaction supplémentaire. Pour ma part, au lieu de la langouste j'ai eu droit à des manchons de poissons grillés au barbecue, comme des manchons de poulet. Ce sont en fait les queues de poisson qu'on mange en rognant autour et c'est très bon avec un filet de citron et un chutney qu'elle m'avait mis tout autour.
Le dîner s'est poursuivi ainsi dans une ambiance d'amis alors que la surface du fjord était devenue plane comme un miroir. Les derniers rayons du soleil ont disparu entre deux montagnes, dans un halo orangé. J'ai été le premier à le remarquer et en ai fait part à tous et ils ont tout de suite rappliqué dehors appareils photos à la main. On dit merci qui ?

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