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jeudi 26 janvier 2012

Bruny Island

Pour rejoindre Bruny Island depuis Hobart il faut gagner Kettering et prendre un ferry qui fait la traversée en 15 minutes. J'ai pris la route côtière et je n'aurais pas dû, ce n'est que des gens qui roulent au pas et des bleds à traverser, un peu comme la petite corniche à Nice que j'évite autant que possible. Malgré tout, j'ai eu de la chance car je suis arrivé pile poil à l'heure d'un ferry alors que je ne savais pas quand il se pointait. Et quelques voitures derrière moi ont dû attendre le prochain... plus d'une heure plus tard !
Bruny Island - Carla Island pour les intimes - tire son nom de l'amiral Bruni d'Encastreaux qui débarqua sur l'île en 1792. Mais ce ne fut pas le seul et pas le premier, le premier c'est Abel Tasman en 1642, qui a donné son nom à l'île et à la mer. Le capitaine Cook est venu aussi mouillé dans Adventure Bay. Décidément, je n'arrête pas de suivre son parcours, j'aurais dû appeler mon blog « Captaincooktour» ! 
L'île est composée en fait de deux îles qui sont reliées par un isthme très étroit, The Neck, avec une haute dune en son centre en haut de laquelle on peut monter. Et où l'on doit, pour avoir le plus beau point de vue du secteur. Sur les pentes de cette dune se trouvent pleins de terriers et d'empreintes d'oiseaux. On ne peut pas marcher sur le sable, à la place ils ont construit un escalier de bois avec une clôture tout autour car c'est à cet endroit que viennent dormir tous les soirs une colonie de pingouins nains et bleus, les plus petits au monde, donc je suppose les mêmes que ceux que j'avais vus dans un trou à Otago en Nouvelle-Zélande. Pour les apercevoir en train de sortir de l'eau il faut être patient. Ils surgissent dans un délai de 1 à 3 heures autour du coucher du soleil. Il est interdit d'utiliser son flash pour ne pas les affoler et on doit se mettre à plat ventre sur le sol pour qu'ils ne nous voient pas sinon ils restent en bande sur le sable pendant que leurs petits meurent de faim dans leur trou. Je les aurais bien attendus mais si je ne peux pas les prendre en photo, l'intérêt est réduit et surtout j'ai pour mission de trouver un endroit où dormir ce soir et ce n'est pas gagné. 
En haut du point de vue j'ai discuté avec un groupe qui m'a demandé d'où je venais. Quand j'ai répondu que j'étais français, l'une d'entre eux s'est exclamée qu'elle en était sûr. Ah bon, pourquoi, est ce parce que je suis monté sur le banc un brin agacé parce qu'ils restaient des heures devant la balustrade à cacher le paysage, afin de prendre une photo par dessus leurs épaules? La réputation des français étant ce qu'elle est, il est fort à parier que ce soit un truc du style. Ils m'ont demandé où j'allais après. Quand j'ai répondu dans le Queensland, ils ont pris un air affolé et m'ont demandé si j'étais au courant pour les inondations là bas. Apparemment l'état est sinistré par de violentes pluies qui durent non stop depuis des semaines (sans doute depuis que j'ai quitté la Nouvelle-Calédonie !) et les routes sont barrées, on ne peut plus circuler. Ils m'ont dit que j'avais fait le bon choix de venir plutôt en Tasmanie et m'ont conseillé de ne me rendre à Cairns qu'au dernier moment et par avion, pour passer au dessus du merdier. Bref, il va falloir encore que je change mes plans car j'avais prévu de passer la dernière semaine de mon séjour en Australie dans le Queensland. Là je suis un peu à sec, mais bon, j'ai encore le temps de voir venir.


L'île du nord est très agricole, des prairies, des vaches, des fermes, tout est en propriété privée sur des domaines à perte de vue qui donnent l'illusion de grands espaces sauf qu'ils sont clôturés ! Il n'y a que la route qui soit publique. Rien à attendre donc côté camping sauvage dans cette partie. En revanche on croise plein de panneaux invitant à venir à la ferme goûter leurs fromages, leur vin leurs fraises ou leurs framboises. Tout cela fait envie mais je ne me sens pas trop d'y aller seul, avec le fermier sur le dos qui me vanterait ses produits pour me pousser à tout acheter. J'ai tort car tout est succulent sur cette île et tout Hobart s'y presse pour y manger de bons produits du terroir. Une spécialité que l'île s'est donnée également c'est la dégustation d'huîtres. Il n'y a pas un endroit où l'on n'en trouve pas.
Juste après avoir dépassé le point de vue, toujours au niveau de l'isthme se trouve une aire de camping autorisée sous les pins. Elle est relativement petite et non extensible car des clôtures se trouvent tout autour pour ne pas pénétrer dans les propriétés avoisinantes. 
On dirait qu'il a des gants!
Et l'endroit étant plein de tentes grandes comme des chapiteaux de cirque, la seule solution de repli serait la plage mais qui est relativement battue par les vents et sur laquelle il faudrait que je marche assez longtemps avec mon barda pour que l'on ne puisse pas me voir de nuit à la lueur d'une lampe torche. Car le terrain est géré par l'office du parc national et requiert une admission par le système des enveloppes d'auto déclaration qui sont cette fois bien là. Donc un contrôle est toujours possible ; ce n'est pas le problème de payer, je n'ai rien contre mais si c'est pour être ensuite délogé de la plage pour être invité à rejoindre le troupeau, ça ne m'enchante guère. J'ai donc continué mon chemin.
South Bruny est à l'opposé de North Bruny : c'est une île très boisée dont toute l'extrémité sud est inaccessible autrement qu'en 4x4 et qui possède un parc national. Impossible donc pour moi d'explorer le parc. C’est ce que je voulais faire, c'est bien dommage. Mais d'un autre côté le ciel voilé de milieu d'après midi s’est transformé en ciel tout gris en fin de journée, aussi je suis moins enclin à visiter le parc. 
A la place, je me suis rendu à la meilleure table de l'île (sachant que les possibilités de restauration sur Bruny se limitent à deux restaurants) pour réserver pour le soir. Peine perdu, c'est déjà complet. Je me suis remis donc en quête d'un coin, résigné à manger des abricots secs, des noix et des chips ce soir. J'ai trouvé un superbe coin en haut d'une falaise, par un chemin qui descend depuis la route. En plus à son commencement ça forme comme un parking où je peux mettre ma voiture en retrait de la route. Visiblement des gens ont déjà passé la nuit là car il y a des restes de feu de camp... et de crottes de pademelon, que j'ai dégagées en shootant dedans. Une bonne chose de faite, un souci en moins. Du coup j'en ai profité pour flâner et me diriger vers le centre touristique de l'île, Adventure Bay, où se trouve une petite épicerie dans laquelle je pourrais peut être améliorer l'ordinaire bien que mon guide dise qu'ils ne vendent que des trucs en poudre et en conserve pour les campeurs. Ce qui est totalement faux. C'est petit mais très bien achalandé, je n'ai encore rien vu de bien mieux en Australie et surtout il y a un bloc réfrigérant garni de fromages de Tasmanie. Avec une salade sous vide et un pain encore chaud, j'ai un bon dîner pour ce soir. Pour le vin, en revanche c'est une autre paire de manches. En Australie l'alcool ne se vend que dans des points spécialisés, et jamais dans les épiceries. Il faut pourtant que je goûte au vin de Tasmanie il paraît qu'il est merveilleux et que s'il n'est pas connu ailleurs c'est parce que les habitants boivent tout le stock et qu'il n'en reste plus une goutte pour l'exportation !
Ça grouille!
La baie se termine en cul de sac et tandis que je faisais demi tour j'ai aperçu un gros kangourou devant une palissade d'un jardin. Un tout gris au ventre blanc. Un kangourou, vrai de vrai, pas une miniature de pademelon. Je me suis arrêté net, au bord du coup du lapin. Il me regardait de ses yeux, fixement, debout sur ses pattes arrières, ses pattes de devant croisées sur son buste comme s'il tenait un sac à main, façon Bernadette, bouche bée, une oreille tournant dans un sens pendant que l'autre était ailleurs, comme les chats. Il avait actionné son radar ! En regardant de plus près il n'était pas le seul le bougre, il y en avait au moins une dizaine tournés dans le même sens comme des tournesols. J'étais hilare ! Devant l’effervescence, les propriétaires du jardin qui me regardaient faire depuis leur terrasse à l'étage où ils prenaient l'apéritif m'ont baragouiné un truc auquel je n'ai rien compris. Visiblement ce n'était pas pour que je déguerpisse car ils me faisaient des signes pour que j'aille me garer derrière leur maison. Sans doute que je leur gâchais la vue. 
Je suis donc allé derrière, bravant les panneaux «private property », sauf que derrière il y avait trois maisons avec de l'herbe tout autour sans clôture, ce qui faisait qu'on ne savait pas chez qui on mettait les pieds. Je me suis garé là et quand j'ai ouvert la portière j'ai compris pourquoi ils voulaient que je vienne par là. Une grande tribu de kangourous occupés à brouter dans les herbes et dont ma présence leur avait coupé l'appêtit, comme autant de nains de jardins version géants ! Ils étaient tous immobiles ne sachant pas quoi faire. Ils étaient une bonne vingtaine, il y en avait à tous les étages, façon stand de tir. Et surtout au milieu d'eux se trouvait un kangourou tout blanc, sans doute un albinos. Quand j'ai voulu les voir de près ils sont tous partis dans les bois en faisant de grands bons. Pourtant je n'étais pas si près et vu la vitesse à laquelle ils détalent ils ont tout le temps de battre en retraite. Bien farouches que ces kangourous ! C'est assez grand, ils font facile plus d'un mètre de haut.
L'un des propriétaires au balcon est venu me voir. Il m'a dit qu'ils allaient ressortir et que je devais me tenir discret. Et en effet, le tout blanc est arrivé, moins farouche que les gris. Seulement il était occupé près d'une clôture d'une maison et pour les photos ça ne faisait pas génial, on aurait dit qu'il était dans un enclos. C'est alors qu'un habitant de la prairie, plus loin, qui prenait aussi son apéritif dehors et avait vu mon cirque a surgi dans mon dos et m'a demandé si j'avais du pain. Vu le type, hirsute, des tatouages partout, une barbichette qui lui cachait le cou et des dents manquantes, j'ai crû que c'était pour lui. Devant mes balbutiements, comme quoi c'était pour mon dîner ce soir, il m'a dit de prendre juste un bout pour les kangourous, qu'ils adorent ça et que ça allait me permettre de les attirer. Il m'a demandé de le suivre. J'étais dans son jardin, juste à côté de la terrasse au milieu de jouets d'enfants et je n'en revenais pas qu'il m'ait offert l'hospitalité pour me permettre de mieux approcher les kangourous. Car son jardin un peu en hauteur a une vue panoramique qui permet de voir tout ce qui se passe. Ce n'est pas en France que quelqu'un vous inviterait chez lui en vous voyant roder autour de son jardin ! Je n'en revenais pas. Et il m'a donné tout un tas de conseils, comme par exemple de ne jamais les regarder dans les yeux sinon ils restent bloqués. Il est marrant mais va donc prendre en photo un kangourou sans le regarder!
En tout cas le coup du pain, ça marche fort, le kangourou blanc n'y a pas résisté et prenait la pose. Et ce n'est pas un albinos : comme ce que m'a dit le type, il a les yeux noirs comme les autres, et non roses. D'autres ont fini par rappliquer mais en nombre bien plus restreint que quand j'étais arrivé. Je n'arrivais pas à me défaire de l'endroit. Le gars m'a dit au bout d'un moment au revoir et a tiré son rideau et je suis resté un temps à côté de la terrasse. J'aurais dû partir mais chaque fois que je faisais un pas vers la voiture, je voyais une petite tête inquiète qui émergeait des herbes. Quand on voit ça on est obligé de rester à regarder, c'est si mignon qu'on a envie de se mettre entre leurs pattes de devant contre leur cœur. Comme l'heure tournait et que les ombres gagnaient du terrain, j'ai dû amputer le dîner. Mais mieux vaut il manger ou vivre des moments exceptionnels parmi des kangourous ?


Ce matin, je suis retourné au point de vue pour avoir un autre éclairage avec cette fois le soleil dans le dos. Il y avait là un couple de hollandais qui se lamentaient d'être venu spécialement sur l'île pour voir des bêtes et que jusqu'à présent ils n'avaient pas vu grand chose. Pour les consoler je leur ai donné le tuyau d'Adventure Bay mais cela n'a pas eu l'air de leur faire grand effet. Des blasés des kangourous. Aussi quand j'ai rajouté que j'en avais vu un tout blanc, immédiatement j'ai vu une étincelle dans leur regard et la fille qui jusqu'à présent ne disait mot, assise le nez dans le col de son coupe vent, s'est redressée pour me demander où précisément. Ce soir je pense que je referai un saut au belvédère pour tenter d'apercevoir les pingouins, maintenant que je ne suis plus stressé par l'heure du fait que j'ai un point de chute.
J'ai passé le reste de la journée à me balader, de criques en criques, à marcher sur la plage, à chercher des éclairages et des angles inattendus pour en faire de belles photos. Et à manger des mûres le long des chemins. Vive les saisons inversées ! Il y a toujours un truc à faire, à voir, je ne m'ennuie jamais quand je suis dehors, sauf si la météo joue les troubles fêtes, ce qu'elle a failli faire aujourd'hui car il a plu toute la matinée. J'étais prêt à reprendre le ferry quand des éclaircies ont surgi comme pour me demander de rester. Et je ne regrette pas !




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