Ce qu'il y a de bien en
Australie c'est qu'on peut passer de la Grèce à l'Irlande en
restant au même endroit ! Le temps s'est détraqué dans la
nuit, un vent de fou s'est mis à souffler, venant de l'Antarctique
et amenant avec lui nuages, pluies éparses mais surtout une chute
vertigineuse des températures. Je n'ai pas quitté mon sweat-shirt
de la journée.
Ce matin, je suis
retourné à Seal Bay. Je ne pouvais pas manquer ça, cette colonie
de 300 lions de mer australiens affalés sur le sable. Les lions de
mer australiens sont différents de ceux que j'avais vus en
Nouvelle-Zélande, ils sont marrons/beige et les femelles tirent vers
le crème. C'est la saison des naissances, les femelles ne vont pas
tarder à accoucher et des mâles fiers veillent sur leur harem et
montrent des dents dès qu'un autre passe près de son domaine
réservé.
Pas commodes les bonhommes, ils pourchassent, grognent et
donnent de vifs coups de tête en avant pour mordre. En général
l'assaillant a tôt fait de déguerpir.
J'étais le premier à
arriver au parc, ils étaient juste en train d'ôter le cadenas à la
barrière. On a le choix entre deux formules : soit un tour
avec un guide qui nous amène au plus près des animaux, sur la
plage, soit un tour par soi même, où l'on ne peut contempler les
mammifères que depuis une plate-forme un peu en retrait. J'ai eu
une jeune guide pour moi tout seul qui m'a raconté les secrets de
ces animaux que visiblement elle ne se lasse pas d'admirer. Elle
n'arrêtait pas de rire de leurs mimiques alors qu'elle enchaîne les
tours tout au long de la journée. On voit qu'elle aime son boulot.
Ce qui devait être un travail saisonnier pour l'été se prolonge,
elle a décidé de rester plus longtemps. Tu m'étonnes, si je
commençais à travailler dans un parc national, je ne crois pas que
j'aurais envie de retourner à la vie normale. En plus en ayant
tous les jours l'occasion de voir des lions de mer. Elle me montrait
où regarder, elle avait l’œil, ici un lion de mer en train de
sortir de l'eau, là un autre qui allaitait, ailleurs une femelle
prête à mettre bas, plus loin deux mâles en train de se battre...
Il y a une vie incroyable, où que l'on regarde les scènes sont
différentes. Il faut dire qu'il y a tellement d'individus ! Il
y en a un qui m'a bien fait rire : il revenait de la pêche au
large et a débarqué sur la plage après avoir fait du surf !
Il y a de gros rouleaux mais ils ont l'air d'avoir l'habitude. Dès
qu'une vague se présente ils plongent et resurgissent tout de suite
après.
Les remous, les courants, rien ne les arrête. L'eau est leur
élément. Ils filent là dedans comme un dauphin et le contraste est
saisissant avec leur démarche lourde quand ils sont à terre.
La garde m'a dit qu'ils
vivaient jusqu'à 25 ans et qu'en général ils partent se nourrir à
quelques 70 kilomètres au large pendant 3 jours puis reviennent ici
se reposer et digérer pendant 3 autres jours. Pour se sécher ils se
roulent dans le sable et s'il vient à faire trop chaud, ils filent
dans les dunes se mettre à l'ombre de buissons. Elle m'a raconté
aussi que les déchets marins étaient un vrai problème pour eux car
les bestioles avalent les sacs plastiques, les prenant pour des
poissons, ce qui leur cause un blocage du transit puis la mort, faute
de pouvoir s'alimenter. Un autre fléau ce sont les cordages et
autres bouts de caoutchouc circulaires.
Ils s'empêtrent dedans,
causant des étranglements et quand ils arrivent à s'en sortir c'est
avec de profondes plaies qui s'infectent et causent une lente agonie.
Elle m'a demandé de bien garder mes déchets et de ne rien jeter
dans la nature. Pas besoin qu'elle se donne ce mal, c'est tout
naturel pour moi. Je ne comprends pas comment les gens peuvent jeter
des trucs à la mer. Mais j'avais vu une émission, beaucoup de ces
pollutions viennent d'autres pays moins sensibilisés où les
décharges en plein air pullulent, bien souvent en bord de mer, et
dont les vents emportent tout sur leur passage.
Après Seal Bay, j'ai
pris la direction du parc national de Flinders Chase où j'ai
grignoté un bout à la cafétéria. J'ai aussi discuté avec un
couple hollandais qui est parti pour trois mois avec leur jeune fils
et on a échangé plein d'infos et de tuyaux.
Comme ils allaient en
Nouvelle-Zélande, je leur ai donné les adresses des loueurs de
campervan car la formule les séduit, ils en ont un peu marre de
chercher des motels, bien que cela devienne maintenant plus facile.
Ils m'ont appris que les vacances scolaires étaient terminées, ce
qui explique pourquoi Kangaroo Island est si déserte. L'avantage
c'est que je vais pouvoir bien profiter de mes deux dernières
semaines en Australie. Enfin, pas si sûr car ils m'ont raconté leur
périple en voiture de Sydney à Brisbane. Peu avant Brisbane, ils
ont vu les gens qui faisaient demi tour sur l'autoroute alors que
c'est interdit. Intrigués, ils ont poursuivi et ont constaté que
l'autoroute était sous les flots. Ils ont poursuivi un peu par une
autre route et sont restés à un endroit sur la Gold Coast, en
dessous Brisbane, où ils sont allés se promener en forêt un jour
de pluie puis sont restés enfermés dans leur motel les jours
suivants, avant de se décider à retourner dans le sud.
Ils
voulaient monter dans le nord du Queensland mais avec le temps qu'ils
avaient alors qu'ils n'en n'étaient qu'à la frontière, ils ont
abandonné, se gardant ce périple pour un autre voyage, à faire en
juin-juillet mais pas en cette saison. Pour ma part je garde toujours
l'espoir, prêt à prendre un avion à la première embellie mais
elle ne vient jamais.
J'ai trouvé un fabuleux
guide de 1,7 kg au format grand livre, plein de photos d'un
photographe australien réputé, se présentant sous forme de fiche
par secteur indiquant ce qu'il faut voir. Le guide idéal pour moi :
illustré abondamment, ne présentant que les sites naturels, sans
aucune référence aux hôtels ou aux restaurants. On peut ainsi
choisir d'aller quelque part en fonction d'une photo qui a l'air
prometteuse. J'hésite à l'acheter ici car cela va beaucoup
m'encombrer et il ne me reste plus que deux semaines.
D'un autre côté
l'achat sur le net puis l’expédition en France coûte le prix du
livre. En tout cas je l'ai feuilleté et j'ai un plan B après Sydney
qui se dessine. C'est un itinéraire qui était suggéré par mon
guide et qui, avec les photos, se révèle être un très bon choix :
aller à Melbourne puis louer une voiture pour faire un beau parcours
le long de la côté qui mène à Adélaïde, célèbre pour ses
hautes falaises et gagner l'arrière pays pour aller visiter le parc
national des Grampians. Cela peut se faire en une semaine, c’est le
temps dont je disposerai et après il ne me resterait plus qu'à
prendre un vol Melbourne-Cairns. A étudier...
Dans le parc Flinders
Chase, je me suis rendu en premier à Remarquable Rocks, à 15
kilomètres du centre des visiteurs par une route limitée à 60 à
l'heure, célèbre pour ses rochers...remarquables, polis par les
vents, aux couleurs orangées qui forment de vraies sculptures. Le
site est en revanche très dangereux car situé en haut d'une falaise
et des vents violents balayent la zone, ce qui rend la promenade
délicate. Bien souvent j'ai été obligé d'avancer le dos plaqué
aux rochers ; si je m'exposais au vent je m'envolais
littéralement. C'est impressionnant, je n'avais jamais encore vu une
telle puissance. Des panneaux indiquent aussi des risques de vagues
qui peuvent venir tout balayer et la présence d'algues qui par temps
humide peuvent faire déraper et précipiter notre chute vers une
mort certaine. C’est pour cela que la partie des rochers la plus
près de l'océan est interdite à la visite. Rien n'empêche
toutefois d'y aller et les familles sont tenues de surveiller leurs
enfants de près.
Non loin de Remarquable
Rocks se trouve Admirals Arch et sa colonie de phoques à fourrure de
Nouvelle-Zélande. Rien à voir avec ceux de Seal Bay, ceux là ne
sont que des phoques, gris et identiques à ceux que j'avais vus
auparavant. Normal, ce sont les mêmes comme leur nom l'indique !
Ils sont tous regroupés dans le même secteur, au bout d'une pointe
aux lames impressionnantes qui viennent parfois déloger des phoques
en train de faire la sieste et qui se retrouvent subitement à l'eau.
Quand ça arrive c'est la panique, ils se mettent à pousser des
cris, ça s'agite mais il n'y a pas de pertes à déplorer. Ils
arrivent rapidement à regagner les rochers. C'est étudié pour. Je
les regardais aller et venir dans l'eau. Je ne sais pas comment ils
font pour ne pas être déchiquetés par les vagues et pour pouvoir
poser la première patte sur un rocher.
Les abords sont noyés dans
une écume et des remous qui provoqueraient la noyade de quiconque,
eux sortent de là comme on sortirait d'un lagon. Il y en a même qui
s'y amusent, faisant des figures, nageant sur le côté ou encore
faisant le poirier, laissant émergé quelques instants leurs deux
pattes arrière en forme de palmier. C'est un spectacle dont on ne se
lasse pas, j'y suis resté des heures.
On y trouve aussi des
bébés, patauds, des espèces de peluches qui s'amusent à taquiner
tous les individus qui dorment autour et qui finissent pas les
chasser en leur soufflant dessus. Il y en a d'autres qui se grattent
avec leurs pattes palmées. Une fois qu'on a commencé à les
regarder, on n'arrête plus de rigoler. Pour voir tout ça il faut
tout de même se farcir leur odeur acre qui prend à la gorge et
qu'on sent des lieues à la ronde. Comment se fait ils qu'ils puent
autant alors qu'ils sont tout le temps dans l'eau ?
Je voulais explorer les
plages du nord de l'île mais elles ne sont accessibles que par des
pistes interminables et j'en ai un peu marre de conduire là dessus
avec l'angoisse permanente de la crevaison. Et puis avec le vent de
fou qu'il y a et des températures automnales, ça ne donne pas très
envie d'aller voir une plage sans pouvoir s'y baigner. En plus avec
cet épisode des phoques, il était déjà 17 heures et donc le temps
de rentrer. Lorsque je regarde la carte de Kangaroo Island, je trouve
que sa forme rappelle Menorca. J'ai l'impression de lire la carte que
je regardais il y a encore quelques mois.
J'ai passé la soirée à
Kingscote, que j'ai surnommée Biscotte (je donne toujours des
surnoms à la con comme Vivonne Bay que j'ai rébaptisée Vovonne
Bay).
C'est le plus grand village de l'île et j'ai bien mangé à
l'hôtel Aurora, dans une salle toute en baie vitrée face à la mer.
Le temps a encore empiré et la pluie s'est mise à tomber. J'ai
regagné la voiture en courant, ne parvenant même pas à fermer la
portière derrière moi. Alors que je cherchais un endroit en sortant
de la ville où me garer pour dormir dans la voiture (impossible de
dormir dehors par un vent pareil), j'ai trouvé une piste qui mène à
North Cape. Tout de suite après un stade se trouvait un bosquet dans
lequel on ne sentait plus le vent. Finalement j'ai pu planter la
tente là et passer une bonne nuit, couvert chaudement tout de même.
Trop beau les lions de mer t&b
RépondreSupprimerDire qu'avant on les tuait! Comment peut on faire du mal quand on voit leur regard?
RépondreSupprimer