Et un de plus! Un nouveau
parc national, la Tasmanie ou la tournée des parcs nationaux. Et ce
n'est pas fini, il n'y a que ça ! J'ai bien eu raison de venir
ici, je suis bien mieux que sous la flotte dans le Queensland. Il
fait grand beau depuis maintenant 7 jours, ça ne m'était encore
jamais arrivé autant de jours de beau temps à la suite depuis que
j'ai commencé le voyage. J'aime les climats secs et chauds, ici je
suis servi. Certes je tombe pendant la meilleure saison, c'est pour
ça. Et il y a beaucoup plus de choses à voir que sur une île
tropicale où sorti du lagon et quelques rochers pittoresques, il n'y
a pas grand chose d'autre à voir. Mon prochain tour du monde sera
plus axé grands espaces, avec le tour des Amériques, je pense être
servi. Finalement les emmerdes ont eu un effet bénéfique, j'ai
réussi à bien rebondir. Au début je me faisais du souci car je
n'arrivais pas à louer un campervan, eh bien je n'en ai pas besoin,
la tente fait largement l'affaire et ma petite voiture consomme bien
moins que ces monstres au gosier toujours sec.
Ce matin, puisque j'étais
à côté des grottes de Junee, j'y ai fait un saut. Il y a une
petite balade d'une dizaine de minutes pour y arriver à travers un
circuit enchanté constitué d'univers moussu et rempli de fougères
arborescentes autour desquelles le sentier serpente. On se sent
lilliputien. J'ai croisé des gens avec un drôle d'accoutrement, des
hommes grenouilles, des bouteilles, des espèces de rampes autour
d'un casque avec des torches et des caméras au bout. La fin du
sentier était plein de sacs à dos et de bouteilles d'air comprimé
laissés sur le côté. La grotte vue comme ça n'a rien de très
exceptionnel, c'est une colline percée d'où s'échappe un ruisseau.
On peut pénétrer à l'intérieur en marchant dans le ruisseau. Je
me suis avancé au maximum que j'ai pu en en escaladant les rochers.
Je pouvais voir plus loin des torches dessiner des raies de lumière
sur les parois. En fait la grotte est la porte d'entrée à un réseau
souterrain de 30 kilomètres de long, constitué de grottes
intérieures (il y en a plus de 300!), de lacs et rivières
souterraines. D'où les hommes grenouilles... J'ai en revanche oublié
d'apporter ma bouteille d'eau comme conseillé par le guide, du fait
que l'eau qui sort d'ici est très pure et même embouteillée à un
niveau. Tant pis!
Après avoir pris de
l'essence je me suis lancé sur la route qui pénètre dans le parc
national. Juste quelques kilomètres après Maydena, j'ai pris sur la
droite une piste caillouteuse qui mène à Styx Valley, endroit
conseillé par mon guide. Le chemin est assez long, il faut conduire
14 kilomètres mais ça ne m'effraie plus, quand on a fait la Western
Explorer, on n'est plus à ça près! A un moment il y avait sur le
sol comme une lanière de pneu éclaté. Alors que j'allais rouler
dessus j'ai réalisé que c'était un long et gros serpent. Je me
suis arrêté et j'ai constaté qu'il n'était pas écrasé, il
prenait juste un bain de soleil sur les cailloux de la piste. Tandis
que j'essayais de m'approcher un peu plus près pour avoir une photo
en gros plan, il s'est détourné et a filé dans les herbes du bas
côté en ondulant. Quand on y pense, vous êtes vous jamais demandé
comment un serpent pouvait avancer en ondulant ? Essayez par
terre de faire des contorsions de droite et de gauche, vous verrez si
ça avance!
A un moment de la Styx
Valley, il y a un sentier qui part vers la Big Tree Reserve en un
court sentier qui tient plus de la promenade de santé. On y
rencontre des eucalyptus multi centenaires dont 2 spécimens battent
tous les records : l'un culmine à 86 mètres tandis que l'autre
le bat d'un mètre de plus. Les troncs font 19 mètres de
circonférence et sont si hauts que la lumière a du mal à passer et
éclaire le sous bois de fins rayons de soleil qui illuminent les
fougères arborescentes en un vert tendre. La vallée est en cours de
classement pour former un nouveau parc national : Valley of the
Giants. Mais elle se heurte à l'opposition de l'économie locale qui
vit de l'exploitation forestière. Leur argument est que la zone est
déjà incluse à un quart dans le Southwet National Park et qu'ils
ne coupent que 1% de la forêt de la Styx Valley chaque année. Cela
fait 10 ans que la guerre fait rage et anime les débats à chaque
élection.
Greenpeace s'en est même mêlé en 2004 et plus loin sur
la route il y a un camp façon hippie avec des tentures aux motifs
hindou et un abri où sont exposées des coupures de journal et des
plaquettes d'information et de protestation. Juste à côté il y a
une grande tente au slogan « Ecology justice » avec des
gens chevelus et barbus qui y vivent, dernier bastion de
protestataires qui invitent à laisser une pièce dans un tronc pour
continuer le combat.
A côté du sentier de la
Big Tree Reserve, il y en a un autre qui descend jusqu'à la rivière,
très sauvage et remplie de troncs morts qui forment des barrages
derrières lesquels se trouvent de petites piscines. L'eau est
toujours couleur thé et cela est dû aux tanins qui sont imprégnés
dans la couche d'humus qui provient de la dégradation des feuilles
d'eucalyptus. Une sorte de tisane d'eucalyptus, quoi! L'endroit est
merveilleux, plein de hautes fougères et de mousses.
Je n'aimerais
pas m'y promener par un hiver pluvieux. Il tombe ici 190 cm d'eau par
an. C'est toutefois 3 fois moins que dans le Fjordland de
Nouvelle-Zélande. Je parle souvent de la Nouvelle-Zélande car c'est
vrai que je retrouve des paysages similaires, les forêts notamment,
avec les mêmes sous bois humides, à la différence qu'ici l'arbre
roi est l'eucalyptus. Et toujours cette nature sauvage omniprésente.
Je voulais voir le lac
Pedder, dans le Southwest National Park mais j'ai appris hier soir en
lisant le guide que c'est désormais un lac artificiel. Il y avait
bien là un lac avant, qui comptait parmi les plus beaux de la
planète, avec des plages de sable blanc sans fin mais en 1972 un
barrage a été construit, engloutissant tout.
Depuis c'est la guerre
des écologistes qui veulent qu'on revienne au lac d'origine mais qui
se battent face à une centrale qui produit 27 fois plus
d'électricité que celle qui est dans le port de Sydney. Ils sont
même venus filmer sous le lac, les plages de sable blanc sont
toujours là, rien n'a changé et on voit même les traces de pneu
des ULM qui venaient se poser. Ils disent qu'en 30 ans le lac
retrouverait sa configuration d'origine. Sachant cela, le lac
m'intéressait bien moins et ne méritait plus les 70 kilomètres que
je voulais lui consacrer pour en atteindre l'extrémité. J'ai
rebroussé chemin dès que je l'ai vu. Au passage, je me suis arrêté
à une aire de pique nique au pied du mont Wedge qui domine tout le
coin de ses hautes parois verticales. J'en ai profité pour asperger
la voiture avec de l'eau qui coulait d'un robinet et que j'ai remplie
dans un bidon de 5 litres d'une vieille bonbonne d'eau minérale que
je me trimbalais. Elle a retrouvé un peu de son éclat mais une
couche de poussière est toujours visible et ne veut pas partir, il
faudrait que je frotte, mais avec quoi, je n'ai que du papier cul!
Lac Pedder |
Sur le chemin du retour
je me suis arrêté au niveau d'une jonction d'où part une piste qui
rejoint un sentier de randonnée insensé. C'est le South Coast
Track, qui fait 155 kilomètres et permet de rejoindre l'extrémité
sud de la Tasmanie où se trouve une route qui rejoint Hobart. C'est
l'expérience ultime à faire en Tasmanie, traversant des paysages de
l'origine des temps, totalement vierges, un truc à réserver à de
doux dingues. Des agences de voyage sont spécialisées dans le
convoi des randonneurs jusqu'à ce point et leur récupération à la
fin, 10 à 13 jours plus tard (dans quel état?). Pour ma part, je me
suis contenté d'un sentier aménagé pour les gosses, le Creepy
Crawly Nature Trail qui passe dans un sous bois maléfique constitué
d'un enchevêtrement de troncs et de branches moussues et couvertes
de lichens pendouillant à travers desquels il faut se frayer un
chemin, en enjambant les obstacles.
C'est un truc qu'adorent les
mômes pour se faire peur. A voir de préférence par une journée
bien humide et dans la brume, quand tout ça est gorgé d'eau -
aujourd'hui la mousse crisse entre les doigts comme des chips. Cela
me rappelait tout à fait la Gomera dans les Canaries.
Ce soir je suis retourné
manger à la même adresse qu'hier, dans le but non dissimulé
d'aller voir des platypus qui sévissent dans la mare du grand jardin
de la propriété. Hier je les avais ratés et je n'avais vu à la
place qu'un pademelon effrayé venu boire un coup. Après avoir
guetté un bon moment, j'ai fini par en voir un. Mais qu'est ce donc
qu'un platypus? C'est une espèce de créature inclassable, de la
même famille que l'echidna, qui pond des œufs et allaite et dont le
mâle possède des sacs le long des pattes arrières gorgés d'un
liquide venimeux qui peut tuer un chien!
Ça a la taille d'une loutre
et un long museau en forme de bec de canard. Ça passe sont temps le
nez dans l'eau avec juste deux yeux qui sortent comme les crocodiles,
quand ce n'est pas en train de plonger. J'en ai repéré un grâce à
son sillage, qui se déplaçait sans bruit. J'ai essayé de l'avoir à
photo mais c'est impossible à avoir. Il était trop enfoui sous
l'eau pour avoir un résultat digne de ce nom.
Sur le chemin qui me
conduisait à Junee Cave, j'ai encore cru apercevoir un diable de
Tasmanie. C'est la deuxième fois que je vois ça : une bestiole
noire de la taille d'un caniche qui s'enfuit en courant comme un
chien, avec le jabot blanc. J'ai regardé des photos de diable de
Tasmanie, ça correspond. Mais quand on voit juste une ombre, c'est
un peu difficile à affirmer. Mais qu'est ce que cela pourrait il
être d'autre ? Dans un endroit où il n'y a pas âme qui vive,
ce ne peut pas être un chien, qui plus est un caniche à sa mémère!
Mount Wedge |
Poésie Nature! Il est charmant comme site. Les photos sont formidables, et tous ces récits culturels me fascinent. Compliments, et que l'aventure continue jusqu'au bout.
RépondreSupprimerJM.