Google Website Translator Gadget

lundi 23 janvier 2012

Lake Saint Clair National Park


J'ai quitté le lac Burbury pour prendre la route dès 6h30 du matin. La faute à la batterie de l'ordinateur, complètement vide, qui me prive de rédaction du blog. Le seul espoir que j'ai, c'est qu'arrivé à destination au lac Saint Clair, ils aient des prises électriques au bureau du parc. Pour y arriver il faut traverser le parc national Franklin-Gordon Wild Rivers sur 100 kilomètres, dont je n'ai rien vu car il était plongé dans la brume du matin. C'est dommage car j'ai lu après coup qu'il comporte l'un des sommets les plus intéressants de la Tasmanie, tout de roche blanche qui tranche avec les autres sommets autour. Quelques sentiers de randonnée existent également pour des balades faciles et pas très longues. Je ne suis pas très friand des balades qui durent une éternité. A la fin on ne regarde plus rien et la seule chose à laquelle on pense, c'est d'arriver à destination le plus vite possible. Une randonnée de 3 ou 4 heures c'est la maximum avant que la fatigue ne prenne le dessus.
La route a été le théâtre d'un terrible massacre la nuit dernière. Il y a de gros animaux écrasés, dont des wombats, gros comme des sangliers et qui font un tas au milieu de la route. On est obligé de se détourner sur l'autre voie pour passer. On ne compte plus non plus les pademelons. Il faut que je rétablisse la vérité : de tous les kangourous que vous avez vus en photo, pas un n'est le vrai kangourou. Le petit croquignolet très commun à oreilles de souris, c'est lui le pademelon. Le plus gros et plus foncé qui ressemble davantage au kangourou c'est le wallaby. Il est en photo dans mon épisode sur la randonnée à Freycinet. Le vrai grand kangourou, il faudra encore attendre un peu. Mais tout ça ce sont des marsupiaux qui sautillent gaiement.
Le lac Saint Clair est en fait contenu dans le parc national de Cradle Mountain. On y accède par une petite route qui passe au milieu des pins et qui fait très montagne. Un panneau comique invite à rouler doucement en raison de la présence d'echidnas.
Lac Saint Clair
Je ne connais pas le nom en français alors je vous mets celui par lequel on l'appelle ici. J'ai donc réduit la vitesse et justement il y en avait un qui traversait la route. Je me suis arrêté dans un crissement de pneu. La bête n'est pas très farouche et se laisse approcher sans changer ses habitudes, c'est à dire farfouiller un peu partout. C'est un fouineur, il passe sont temps son museau planté sous les feuilles mortes, comme s'il forait, à la recherche des fourmis et termites dont il est friand. Du coup c'est un exploit de voir sa tête. Il ne doit pas avoir très bonne vue car il ne se mettait en boule que s'il m'entendait. Je pouvais m'approcher sans bruit jusqu'à presque le toucher. J'ai écrit avant que ça ressemblait à un hérisson. Par la taille seulement. Car ce qui ressemble à des épines n'a pas vraiment l'air d'en être et semble plus être des poils plus longs que le reste. C’est très trapu et ramassé, on dirait que c'est passé sous un rouleau compresseur, avec des pattes de tortue. 
L'echidna n'est pas un mammifère, il fait partie de ces animaux qui n'ont pas réussi à trouver leur voie. Je ne savais même pas que de telles bizarreries existaient. Ce sont des monotrèmes. Ils pondent des œufs et allaitent ! Quand on voit la bestiole, on a du mal à penser que ça sort d'un œuf, ça ressemble bel et bien à un mammifère. C'est une famille qui a émergé il y a 150 millions d'années. Certains pensent que c'est le chaînon manquant entre les reptiles et les mammifères mais ça n'a rien d'un reptile.
Au bureau du parc où je suis arrivé pile poil pour l'ouverture à 8h, j'ai appris qu'il existait un pass valable 2 mois et donnant accès à tous les parcs nationaux. Il en coûte 60 dollars. Avec tous les parcs que j'ai visités et dont j'ai gardé les tickets en souvenir, la guichetière s'est proposée d'elle-même d'en additionner le tarif pour calculer la différence avec le pass. En échange j'ai un papier à coller sur le pare brise. C'est mon sésame vers la nature sauvage ! 
Il y a aussi un passeport à conserver sur soi au cas où l'on serait contrôlé par un garde lors d'une balade. L'employée du parc m'a demandé quelle randonnée je souhaitais faire. Elle a été très précieuse dans ses conseils et m'a donné des guides sur tous les parcs et un petit livre très bien fait sur toutes les randonnées faciles à faire à travers la Tasmanie. Je lui ai répondu qu'une randonnée de 3 heures serait l'idéal. Elle m'a conseillé de me rendre alors au Shadow Lake, au dessus du lac Saint Clair, qui prend 3-4 heures.
En attendant, je me suis assis sur un siège pour écrire mon blog. Je n'en ai émargé qu'à 10 heures passées, pestant de ne commencer la randonnée que si tard. J'ai donc filé à la voiture en quatrième vitesse me préparer. La casquette, de la crème solaire, la bouteille d'eau remplie pour tenir 4 heures et toujours les choses précieuses avec moi. Le début de la randonnée n'est pas très intéressant et interminable. J'ai marché ce qui me semblait être une éternité à travers des bois d'eucalyptus et de bruyères géantes, montant doucement sur un chemin caillouteux tord cheville très étroit bordé d'une espèce de plante naine aux rameaux très durs, un genre de myrtille, qui m’écorchaient les chevilles. Ça va un temps mais après deux heures ainsi, je me demandais quand j'allais pouvoir avoir un point de vue sur le lac Saint Clair ou sur les sommets autour. J'ai même pensé rebrousser chemin. 
Mais dès que l'idée m'est venue, je me suis retrouvé à une jonction où je devais tourner à droite vers le lac Shadow ou poursuivre tout droit jusqu'au mont Rufus. J'ai hésité, tout droit c'était très beau, la forêt laissait place à un étage subalpin plus clairsemé avec de belles perspectives de point de vue et on voyait au fond le mont Rufus, tout proche et pas très haut. Encore une heure pour arriver là haut ? Cela me semblait bien long ! Et qu’est ce que c'est une heure maintenant que je suis là ? J'ai donc changé mes plans, me dirigeant vers le mont, qui permet de toute façon de faire une boucle en redescendant vers le lac Shadow. Sauf qu'en guise de randonnée de 4 heures, je suis parti pour 7. Ce qui n’est pas la même chose pour ma réserve d'eau et le fait que je tablais sur le fait d'être redescendu pour 14 heures pour prendre un sandwich au café de l'entrée du parc. Ça me fait chier ces besoins à la con, tant pis, je mangerai une fois que j'aurai terminé, et puis c'est tout, quelque soit l'heure.
Pour ceux qui ont déjà fait de la randonnée en montagne, vous connaissez le système : ce que je pensais être le mont Rufus depuis la bifurcation pour le lac n'en est que les prémices. Une fois qu'on est arrivé là haut, il faut encore marcher vers un nouveau sommet. Et rien ne me disait qu'il n'y en aurait pas encore un autre derrière. Et ce qui avait l'air tout proche et pas haut se transforme en un sentier qui monte raide et sans ombre qui me fait transpirer comme un bœuf. Ma bouteille d'eau est déjà à moitié vide. A partir de là je me suis rationné, m'octroyant deux gorgées toutes les demi-heures. Si je veux encore tenir plus de 4 heures, c'est la seule solution. Les prairies alpines sont pleines de fleurs et on s'attendrait à voir une marmotte détaler en un sifflement. Tout cela doit être recouvert par la neige l'hiver car même si le mont Rufus ne fait que 1416 mètres d'altitude, on a l'impression d'être dans de hautes montagnes. Il était 12h28 quand j'ai posé le pied sur son sommet, où je me suis posé un instant pour profiter de la vue sur 360 degrés. Je me sentais voler comme un aigle, la nature de tous les côtés se perdant à l'horizon.


Deux personnes sont arrivées à leur tour par un autre accès, un père et sa fille. Tandis que la gamine s'amusait à déplacer les pierres que des gens avaient assemblées pour faire une tour au sommet, le type s’est avancé vers moi et s'est présenté, David et sa fille Rebecca. On a discuté randonnée. Je les ai laissés quand ils ont commencé avec les photos. J'ai eu droit à un « It was a pleasure to meet you, God bless you ». Les anglo-saxons ont des formules emphatiques que l'on n'a pas ou que l'on n'emploie pas et qui mettent du baume au cœur. Que Dieu vous bénisse aussi !
En descendant, le sentier comporte quelques planches de bois assemblées en ponton au dessus des prairies marécageuses, un peu à la façon de ce qu'il y avait à Cradle Mountain. Sauf que c'est beaucoup moins large et qu'on marche plus sur du bois mort qu'autre chose. 
C'est complètement dégradé, le grillage a foutu le camp, laissant des clous rouillés auxquels il faut faire attention si on veut pas se retrouver la chaussure scotchée. Le bois part en échardes et en poussière quand on pose un pied. Un peu plus bas on trouve de drôle de rochers très photogéniques qui forment des strates et entre lesquels on aperçoit la vallée dans laquelle le sentier plonge pour rejoindre le lac. Dans la vallée il y a plein de ces espèces de palmiers sans branche, des troncs touffus avec de longues feuilles étroites et piquantes dont certains sont hauts de plusieurs mètres. Ils appellent ça la pandani, endémique à la Tasmanie.
A partir du lac Shadow j'ai senti la fatigue s'installer et je n'appréciais plus rien. Pourtant il me restait encore 2h15 à parcourir. Le chemin s’est à nouveau enfoncé dans la forêt, la même qu'en montant, sans point de vue, de la végétation, toujours la même où tout se ressemble. 
J'ai accéléré la cadence comme j'étais en descente car avec leurs estimations de temps, ça n'allait pas du tout, je serais en bas vers 17h30 alors que j'ai encore de la route qui m'attend pour rejoindre au plus près le Southwest National Park que je compte visiter demain. La Tasmanie ou des parcs nationaux sans fin : ils couvrent 40% du territoire, c'est pour ça que je suis venu !
La bouteille d'eau était à présent quasi vide et mon estomac criait famine, chaque pas devenait une épreuve, me demandant où mon corps allait puiser son énergie, sachant que hier soir je n'ai mangé qu'une salade grecque. J'avais rempli la bouteille d'un litre seulement pour ne pas avoir trop lourd à porter, j'ai fini la descente avec la gorge sèche, déshydraté. Ça fait partie de l'aventure. On ne peut pas toujours tout prévoir, il y a toujours une part d'imprévue, à moins d'être arnaché comme ces randonneurs que je croise, le dos courbé, tirant la langue et chargés comme une mule avec des sacs à dos plus lourds qu'eux contenant tout leur barda d'autosuffisance. Tu parles d'un plaisir !

Lac Shadow
Finalement je suis arrivé en bas plus tôt que prévu, à 16h45, trois quart d'heure en avance par rapport au temps annoncé. J'aurais tout de même fait une randonnée de plus de 6 heures, sans manger. J'ai alors vu sur le panneau des sentiers de randonnée que j'avais parcouru 18,5 kilomètres, plaçant cette balade dans la plus longue que je n'ai jamais entreprise. En guise de randonnée courte, j'ai pulvérisé un record! Je me suis précipité au café commander une bière bien fraîche que j'ai dégustée en fermant les yeux. Après l'effort, le réconfort !
En prenant la voiture, j'avais la main dans un pochon de noix de 750g dont je ne pouvais m'extraire. Quand je commence avec ça, on ne sait jamais quand je vais m'arrêter. J'avais aussi pris dans le coffre un sac d'abricots secs et une banane dont il ne m'est resté qu'un bout entre les doigts quand je l'ai épluchée. Ça m'a énervé, déjà que je n'avais que ça.
Je l'ai donc récupérée à mes pieds, dans le sable et la crasse qui s'étaient incrustés à sa surface. Je l'ai nettoyée avec le T-shirt, cela ne suffisait pas, je me suis donc saisi de la bouteille d'eau pour la laver un peu, l'eau tombant sur le tapis de sol de la voiture. Rappelons que je faisais tout cela en conduisant. La pseudo amende des flics n'aura pas suffit. En voiture il y a toujours plein de trucs à faire, regarder la carte, chercher un truc dans le sac, je ne peux pas m'arrêter à chaque fois. Et même si je le voulais on ne peut pas, il n'y a aucun endroit où s'arrêter le long des routes. Si vous avez vu le sketch de Mister Bean qui part travailler en voiture un matin alors qu'il est en retard, c'était tout à fait moi ! Pour le coup, j'ai écrasé un oiseau, comme une perdrix, qui ne voulait pas s'envoler. Je n'ai pas pu l'éviter et ça a fait un bruit comme une coquille d’œuf qu'on écraserait. C'est atroce, une vie réduite à une explosion dont j'entends encore le son me hanter. Je peux me consoler en me disant qu'au moins il n'aura pas souffert...
Pendant ce temps la jauge d'essence de la voiture ne cessait de descendre et elle n'allait pas tarder à me le signaler bruyamment. La station sur laquelle j'ai jeté mon dévolu, l'avant dernière avant le parc national venait de fermer, le rideau de fer était à moitié tiré et la gérante n'a rien voulu savoir. J'ai donc continué mon chemin, vers Maydena, dernier village qui mérite ce nom d'après mon guide avant « the wilderness ». Là c'était encore tout fermé. Trop tard, ils ferment tout à 17 heures, même les stations d'essence, j'aurais dû m'en douter. Du coup j'étais bloqué à Maydena. Impossible d'aller plus loin sans faire le plein. Heureusement dans le village le seul hébergement qui existe Giant's table, fait restaurant et est ouvert aux non pensionnaires. La dame qui m'a reçu, très aimable, m'a demandé de m'installer, qu'elle allait me préparer à manger. A 18h40 ! J'ai pris place sur la terrasse d'une maison coloniale, face au jardin, profitant des derniers rayons de soleil et j'ai constaté que j'étais tout crotté de ma randonnée et ça contrastait fortement avec le blanc éclatant de la nappe et les couverts en argent.
Du coup j'ai tout caché sous la belle nappe que j'évitais de toucher avec les jambes pour ne pas qu'elle ait trop de lessive à faire. Le dîner était excellent et recherché dans les ingrédients et la manière de cuisiner. J'ai eu un filet de poulet, garni d'une sauce à un fruit rouge dont je n'ai jamais entendu le nom auparavant, avec une croûte de chapelure sur le dessus, accompagné d'un assortiment de légumes cuisinés de différentes façons, sautés, en gratin, à l'étuvée. Que du frais et fait maison d'après mon guide. Ça ce sentait, ma mère n'aurait pas été plus longue, je suis resté là 1h30 pour une entrée et un plat. J'y retournerai sans doute demain soir, d'autant plus que la propriétaire des lieux m'a donné un très bon conseil où planter ma tente, au bord d'une rivière, juste au niveau du cul de sac pour accéder aux grottes de Junee. C'est un endroit où les gens du coin viennent camper et qui est non officiel. En effet, il n'est pas répertorié dans le guide des endroits où faire du camping sauvage - décidément un achat inutile qui va finir à la poubelle en partant. L'avantage est que j'étais tout seul. Enfin presque, car j'ai entendu des trucs se déplacer lourdement dans les fourrés qui tapaient du pied comme un lapin au moindre son en détalant. A la lumière de ma torche j'ai pu voir que c'était des pademelons et de toute évidence j'avais choisi de planter ma tente dans une prairie bien grasse qui devait être leur garde manger car ça n'arrêtait pas de taper du pied dès que je me retournais dans mon sac de couchage, et avec les panards que ça se paye la terre tremblait plus qu'à Christchurch!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...