Le backpacker dans lequel
j'ai dormi la nuit dernière n'était pas terrible. Vieillot, étriqué
et il flottait une odeur de pantalon de petit vieux imprégné de
pisse. Ça débordait de japonais vivant chacun de leur côté un
casque sur la tête à appeler le pays, allant et venant dans les
chambres en claquant les portes. L'avantage est que j'avais réservé
une chambre à deux lits à partager et ce soir je suis tout seul
dedans. Mais on entend les voisins comme dans la même pièce, normal
les murs sont en carton, si si, il y a des endroits que les gens ont
écorné et on voit comme du papier mâché en sortir. J'ai jeté un
coup d’œil indiscret dans un dortoir, c'est pire : ils sont 6
ou 8 avec des lits superposés dans un espace grand comme un wagon
lit. Certes les prix ne sont pas chers mais avec son taux
d'occupation et son espace maximisé, je suis sûr que le
propriétaire en tire plus de profit qu'un hôtel classique. Je
m'étais fié à Tripadvisor pour guider mon choix, va falloir que
j'écrive une critique pour faire baisser la moyenne générale !
Ce matin, la première
chose que j'ai faite c'est d'ouvrir le rideau. Ciel lourd. Je m'en
doutais. Quand je vous disais que ça me suivait... Du coup j'ai
trainouillé au lit, faisant un peu d'internet, avant de me résoudre
à déguerpir. Oui mais où ? Je comptais filer sur le parc
national de Freycinet, à l'est, que l'on a survolé hier soir en
arrivant en avion mais c'est un site qui est l'un des clous du voyage
et le seul sans doute à voir sous un beau temps ensoleillé. Car le
parc est constitué de sommets, de forêts et de plages vierges au
sable blanc de toute beauté. Une de ses baies, dont je vous
révélerai le nom quand j'y serai, est dans mes livres « les
100 plus belles plages du monde » et « 101 must visit
island ». Et quand on voit la photo on comprend pourquoi. J'ai
regardé les prévisions météo sur Hobart, demain il pleut et le
soleil est de retour après demain. Cela me laisse donc deux jours à
occuper.
J'ai d'abord fait un saut
au centre d'information d'Hobart, afin de me procurer un livret
conseillé par mon guide sur la Tasmanie : « The guide to
free-camping in Tasmania ». Car la Tasmanie est le dernier
endroit en Australie où l'on peut faire du camping sauvage, à
certains endroits tout de même. Il me semble l'avoir déjà dit,
peut être que je radote, à force je ne sais plus. J'ai acheté
également une carte qui me sera fort utile. Restait à établir
l'itinéraire du jour. J'ai une idée des sites que je veux voir mais
ne sais pas dans quel sens les enchaîner. Sous un temps pareil, il
vaut mieux aller dans les montagnes, les photos s'en sortent mieux
qu'une plage. Je me suis arrêté dans un supermarché du centre pour
faire quelques provisions pour le pique nique (toujours les mêmes
prix délirants, 8 euros une salade sous vide, 3 euros un yaourt, 3
euros une bouteille d'eau...) et le caissier m'a demandé où
j'allais aujourd'hui. Pris au dépourvu et commençant à balbutier,
pour me sortir d'affaire je me suis souvenu du parc national de Mont
Field, que je venais de lire. Il m'a félicité pour mon excellent
choix, de plus ce n'est pas loin de Hobart. Puisqu'il le dit, c'est
donc là où je vais. C'est décidé.
Sauf qu'une fois dans la
voiture, alors que je m'éloignais vers le nord ouest et donc un peu
plus du parc de Freycinet, j'ai réalisé que c'était crétin de
filer là bas le temps que le temps s'améliore puis de redescendre
sur Freycinet alors que je serai sur le chemin de deux parcs
nationaux à tomber que je veux voir absolument et situés dans les
montagnes : Southwest national park et Craddle Montain national
park. Et si je les enchaîne, je ne profiterai pas de l'embellie pour
voir Freycinet. Retour à la case départ. Et puis zut, puisque je
veux voir le parc de Freycinet depuis toujours et que c'était dans
mes plans s'il avait fait beau, je me suis dit que j'allais y aller,
quitte à attendre là bas avant d'entreprendre les randonnées. Et
puis après tout, vu que c'est sur une presqu'île, il y a peut être
un micro climat favorable.
Pendant que je
conduisais, je suis tombé en zappant à la radio sur une station qui
parlait français, radio France International. Je ne savais pas que
ça existait. Apparemment c’est une antenne régionale car les
nouvelles sont principalement focalisées sur l'Australie. Cela fait
drôle d'entendre parler français en Tasmanie ! J'ai écouté
le bulletin météo, le plus chaud d'Australie aujourd'hui c'est
Alice Springs, vers là où j'étais dans le désert, avec 40 degrés,
suivi d'Adélaïde avec 39 degrés puis Hobart qui arrive en
troisième position avec 33 degrés. Je ne m'attendais pas à de
telles températures si bas dans l'hémisphère. Mais il faut dire
que toute le sud de l'Australie est hors des tropiques et vu qu'ici
c'est le 17 juillet, ce sont des températures de saison (l'hiver il
y neige). Je ne savais pas non pus qu'Hobart était la deuxième
ville la moins humide d’Australie, derrière Adélaïde.
Il y a encore une
différence entre une carte qu'on voit sur un livre avec une échelle
des distances à côté et la réalité du terrain. Freycinet a l'air
d'être tout proche d'Hobart, en fait c'est à près de 200
kilomètres. Je sens que je n'ai pas fini de faire des kilomètres.
Je suis content de ma petite voiture, une Nissan Micra toute neuve
(3809 kilomètres au compteur) qui se pilote au doigt et à l’œil,
sauf qu'elle n'est pas automatique. C'est la première fois de ma vie
que je conduis une voiture en roulant à gauche avec une boîte
manuelle. Eh bien c'est une horreur ! Pour changer les vitesses
de la main gauche, c'est une autre affaire quand on est droitier. Ils
auraient pu au moins laisser ça à droite ! Ils sont donc tous
gauchers ou quoi ? Le pire c'est pour passer la marche arrière ;
je tord à chaque fois la manette dans tous les sens, ça ne vient
jamais, à chaque fois je suis obligé de lâcher le volant et de m'y
prendre à deux mains ! Et je ne compte plus les démarrages
directement en troisième. Je comprend maintenant pourquoi les
anglo-saxons ont des voitures automatiques : c'est impossible de
conduire une voiture dans ces pays quand on est droitier ! La
prochaine fois je réserverai une automatique...
Je me suis arrêté
manger à un fish and chips à Swansea à 12h17, bien qu'ayant de
quoi pique niquer. J'ai réfléchi, c'est mieux de garder ça pour ce
soir vu que je camperai certainement loin de tout endroit où je
puisse me restaurer. Et puis ils proposaient un poisson sauce aigre
douce avec du riz, ça équilibre mon régime, j'en ai donc profité.
En reprenant la route, j'ai bifurqué sur la gauche dès que j'ai
pénétré dans le parc de Freycinet, direction Friendly Beaches où
sur la carte ils ont mis une tente en pictogramme. Et puis peut être
que j'y resterai si c'est bien, je verrai le cœur du parc plus tard,
je n'ai que ça à faire. Pour rejoindre la plage il faut emprunter
une piste de graviers qui mène à une barrière où il est demandé
sur une écriteau de payer pour rester la journée, en mettant
l'argent dans une envelopper prévue à cet effet et en gardant le
talon à positionner bien en évidence derrière son pare-brise. Sauf
qu'il n'y a plus d'enveloppe, que le tronc. Alors quoi, mettre
l'argent dans la fente sans preuve de l'avoir fait ? J'ai
continué mon chemin comme si de rien n'était.
Au cinquième pas sur le
sable, alors que je traversais la dune, j'ai sursauté en sentant une
présence bouger sur ma droite e alors que je dépassais un buisson.
Devinez quoi ! C'était un kangourou, un vrai, qui était tout
surpris de me voir également. Il est passé de la position debout à
la position à quatre pattes dès qu'il m'a vu, finissant de brouter
un morceau de branchage qu'il tenait dans sa main. J'appelle ça une
main, ça y ressemble trop, on aurait dit qu'il tenait un bouquet de
fleurs. Il était à peine à deux mètres de moi. J'ai eu le temps
de le prendre en photo, mais sans doute parce que je bougeais, ils
s'est enfui en sautillant dans un fourré. J'ai attendu par la suite,
tapi pour voir s'il allait ressortir mais d'autres personnes sont
arrivées en faisant du bruit. J'ai regardé s'il n'y avait pas
d'autres kangourous dans les dunes, j'ai joué au détective et j'ai
trouvé des empreintes et des crottes. Pour les empreintes c'est trop
drôle ça ressemble à deux balais chiottes bien parallèles, très
espacés car rappelons le, un kangourou ça saute, ça ne marche
pas ! Quant aux crottes... Vous voulez vraiment savoir ?
C'est un peu comme des crottes de brebis, en plus gros et moins
abondant mais tout aussi sec. Le kangourou est un placide herbivore,
c'est pour ça. Celui là était un kangourou Forester, ils sont plus
petits, plus gris et plus mignons je trouve.
Une autre race. Croquignolet non? |
La plage est très
sauvage et offre de gros rouleaux que quelques surfeurs sont venus
squatter. Ils ont disposé leur tente dans les buissons, tous les
recoins sont pris, j'ai eu un mal fou à en trouver un pour moi. Il y
en a beaucoup qui sont seuls, il y a même une femme en vélo qui est
venue me demander si on pouvait camper et qui a mis sa tente riquiqui
dans un renfoncement à quelques dizaines de mètres de moi. Elle
voyage seule et en vélo, c'est courageux. D'une manière générale
je trouve que les australiens sont plus aventuriers que nous. Les
allemands aussi. Les espagnols aiment bien aussi ce genre de trucs
mais ont tendance à rester dans leur pays. Nous on est zéro. Mais
c'est tant mieux, j'aime bien être seul à faire du camping sauvage.
Le sable ici est d'une
finesse incroyable, quand on marche on a l'impression de marcher sur
de la farine. Je n'aime pas trop ça, la texture me fait grincer des
dents depuis toujours. Je préfère le sable plus grossier qui ne
vole pas au moindre coup de vent et qui ne s'infiltre pas partout.
Les galets aussi ce n'est pas mal, lorsqu'ils ne sont pas très gros
cela ne me dérange pas même si pour sortir de l'eau on a quelque
fois l'air d'être godiche comme un pingouin!
Enfin les kangouroux ouuuuuiiii
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