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Secret Beach |
Hier c'est moi qui ai
donné le ton ! C'est le premier qui demande qui fixe le
programme. Car ce matin j'étais un peu inquiet en voyant qu'ils ne
préparaient qu'un seul bateau pendant que quelques personnes de
l’hôtel attendaient. Je pensais que ce serait bien un miracle que
nous prenions tous le même tour. Je n'avais de cesse de faire
répéter au personnel de me confirmer que c'était bien le tour C.
Je n'avais pas envie de me retrouver dans un autre tour, plus demandé
auquel on m'aurait rajouté pensant que je n'aurais vu que du feu
dans le changement. Méfiez vous, je sais parfaitement où je dois
aller ! En fait comme je m'y étais pris tôt, les gens qui ont
suivi pour réserver ont dû se voir proposer d'office le tour C, le
seul de disponible pour la journée. Car il faut être un minimum de
quatre pour que l'excursion puisse avoir lieu. Je craignais que ça
n'intéresse pas grand monde mais ce matin nous sommes six de l’hôtel
de la partie.
Alors que je prenais le
petit déjeuner au dessus de l'eau, je regardais ce paysage fascinant
autour de moi, qui me souhaitait une bonne journée et m'invitait à
aller l'explorer. Des larmes d'émotion me sont venues. C'est si
beau ! J'ai soudain réalisé que je prenais un petit déjeuner
dans cet endroit extraordinaire et qu'on allait bientôt me retirer
cette vue splendide au saut du lit pour la remplacer par des
bâtiments tout gris barrant l'horizon.
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L'autre Secret Beach de Miniloc, avec le soleil! |
On va dire que je suis
masochiste de penser à ça, mais ça m'aide à profiter encore
davantage. Je n'ai de cesse de me répéter : « Profite,
profite avant qu'il ne soit trop tard, hume l'air, regarde partout,
enivre-toi de ce qui t'est donné ici ». Un telle occasion est
unique. C'est le trésor d'une vie, que j'ai tellement attendu et qui
déjà semble prêt de se terminer. Je pense de plus en plus qu'il
ne me reste plus qu'un mois et demi. Ça va vite passer. Cela fait un
an et demi que je vis avec ce voyage en tête. Qu'aurai-je à mon
retour pour m'aider à affronter la vie ?
Sur le bateau, il y a un
couple de coréens dont la femme, une pie qui jacasse haut et fort
des mots qui semblent être une succession de « k-k-k-k-k-k-k-k- »
avec des intonations différentes, ne sait pas nager mais va malgré
tout à la flotte avec un gilet de sauvetage avançant pire qu'un
chien. Il y a une russe de Shanghai, très charmante, douce, toujours
souriante et tranquille avec de la classe qui passe sont temps à
regarder autour d'elle et à ramasser des cailloux et des
coquillages. Je l'aime bien et ça me fait changer d'avis sur les
russes. Il n'y a pas que des rustres !
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Plage du pique nique |
L'autre couple, ils ne me
disent pas bonjour depuis que je les ai fait déguerpir en pleine
nuit parce qu'ils s'étaient installés sur ma chaise longue devant
le bungalow pour discuter. Je leur avais demandé d'aller voir
ailleurs. C'est un australien un peu ours qui se trimbale partout
avec un transistor qui délivre des airs de guitare électrique
nasillards et avec une fille un peu mauvais genre qui semble être
sortie d'un établissement spécialisé de Thaïlande. Elle doit
être des Philippines car elle parle avec tout le monde. Je suis fin
psychologue car j'avais tout de suite trouvé que ce devait être
une chieuse, avec ses grands airs et sa mine dégoûtée en
permanence. Ça n'a pas raté ! Pour accéder au bateau, comme
c'est marée haute et que la plage devant l’hôtel est un des ces
endroits peu profonds et vaseux avec des bancs de sable même à
marée haute, il faut marcher dans la mer sur 200 mètres. Je les ai
vus arriver en marchant sur des œufs et dès qu'elle est montée à
bord ça a été le drame, elle était fermée comme une huître,
reprochant à son ami de l'avoir traînée là, qu'elle pensait qu'il
l'aimait et qu'au lieu de ça elle était couverte de blessures
qu'elle venait de se faire en se cognant les pieds un peu partout. Ça
commençait bien !
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Le détroit entre Tapiutan à gauche et Matinloc à droite |
Pour ma part, ayant pris
place en premier, je m’étais choisi la meilleure position, à
l'avant. Car hier ce n'était pas le cas et j'étais tout le temps à
faire des allées et venues vers l'avant du bateau pour prendre des
photos. Autrement ailleurs il y a toujours un cordage ou l'espèce de
bâche au dessus de la tête pour empêcher d'avoir un champ libre.
Je me suis donc mis devant, côté droit, par là où tout devait
arriver selon l'itinéraire prévu. On a commencé par repasser
devant Miniloc et sa belle plage en croissant, Secret Beach, qui
aujourd'hui se trouve bien au soleil. J'ai donc repris une photo. Le
programme du jour est focalisé sur Matinloc Island, une île toute
en longueur et la dernière de l'archipel avant le grand large. A un
endroit elle se rapproche de sa voisine, Tapiutan, pour former comme
un détroit, presque un fjord. Le paysage est incroyable avec toutes
ces îles aux formes tarabiscotées et aux falaises qui semblent être
des couches d'un mille-feuille acéré dont chaque feuillet est fin
comme une lame de rasoir. C'est très pointu et coupant.
J'ai essayé
d'escalader l'un de ces rochers, bilan : je me suis entaillé la
voûte plantaire. Par chance c'est à un endroit qui ne me gêne pas
pour marcher. Le site me fait penser à des montagnes englouties dont
il ne resterait plus que les cimes. Imaginez un massif de montagne
avec une vue comme ce qu'on peut voir du haut d'un téléphérique,
faites couler de l'eau dans les vallées comme on ferait couler un
bain et imaginez le niveau arriver jusqu'à 2000 mètres. Vous
obtiendrez un paysage similaire, la neige en moins et les cocotiers
en plus ! C'est ce que j'ai vu de plus beau en Asie, surpassant
Koh Phi Phi et la baie de Krabi, en plus sauvage. A mon retour il
faudra que je me renseigne pour savoir comment cet archipel est né.
C’est vraiment unique au monde. On parle toujours de la baie
d'Along – que je n'ai jamais vue – mais ici je crois que ça n'a
rien à lui envier.
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La vue depuis le rocher que j'ai escaladé avant le déjeuner |
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Le déjeuner est servi! |
La coréenne pendant la
traversée nous a donné à tous un bonbon dans un sachet individuel.
Un bonbon rond et violet, mi mou mi dur, façon carambar ramolli, au
goût atroce d'eau oxygénée dans laquelle on aurait plongé un
morceau de sucre. C'était si mauvais que je me retenais de partir en
fou rire ! Le premier arrêt de la journée c'est devant Secret
Beach. Tout comme sa cousine sur Miniloc, l'endroit n'a plus rien de
secret et le reste simplement parce qu'on ne voit rien de
l'extérieur. Il faut prendre son masque et tuba et j'ai dû nager en
tenant mon appareil photo la main hors de l'eau, après avoir pris
soin de mettre l'appareil dans un petit étui étanche. On ne sait
jamais...Et j'ai bien fait car à nager ainsi, on a vite des crampes
et la main se fait moins haute. La faute au bateau qui a dû jeter
l'ancre un peu au large en raison d'un embouteillage devant l'accès.
Sur la pirogue tout à l'heure, l'appareil photo m'a fait très peur.
Il s'éteignait dès que je l'allumais, essayant de zoomer et de
faire la mise au point, sans succès, pendant que l'écran était
tout noir et demandait de redémarrer l'engin. J'ai dû essayer une
bonne dizaine de fois pour le même résultat. J'ai vraiment cru
qu'il était fichu et je me voyais déjà dégoûté de faire cette
excursion sans pouvoir l'immortaliser. En désespoir de cause, j'ai
essayé la manière forte, en lui tapant sur le cul, l'objectif en
bas. Cassé pour cassé... Et là il a démarré comme il faut. Je
n'en revenais pas et n'osait plus l'éteindre. J'ai peut être un peu
trop appuyé sur la lentille ce matin en la nettoyant. En touts cas
dorénavant je me trimbalerai avec son frère jumeau que j'avais
acheté à Auckland. On ne sait jamais et si l'appareil doit rendre
l’âme, il y a peu de chances qu'il le fasse pendant la nuit mais
plus probablement au milieu d'une excursion.
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La vue du haut de "l'église" |
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Shrine Beach |
Comme tous les matins le
temps est plus couvert de nuages gris que de passages ensoleillés,
aussi il faut faire le pied de grue avant chaque prise et quand enfin
le soleil sort pour quelques secondes il y a toujours un intrus pour
passer dans le champ de la caméra, ce qui n'était évidemment pas
le cas quand le ciel était couvert ! J'ai l'habitude, on
appelle ça la loi de l'emmerdement maximum. Je la connais bien, elle
me rappelle son existence tous les jours... La lagune de l'autre côté
de l'entrée est à tomber. Impossible de la prendre en photo en
entier, seul le mode panorama permet de tout cadrer mais avec pour
effet de réduire les échelles aussi les falaises ont l'air encore
moins hautes que ce qu'elles paraissent sur une photo classique.
C'est le problème de Palawan. A faire dans le gigantisme on perd
l'échelle des grandeurs et c'est très compliqué d'avoir une bonne
photo. C'est un endroit à vivre que rien ne peut refléter. On peut
aussi y faire du snorkeling et je ne me suis pas privé, même avec
un tuba percé.
Quand je suis remonté à
bord, l'asiatique était encore plus pincée qu'avant, drapée dans
un fichu et sa dignité avec des lunettes de soleil où rien ne
sortait. Quand son type est revenu, elle a fait une crise de nerfs en
refusant de lui parler et lui tournant le dos en fixant l'horizon.
Sans doute qu'elle en avait marre d’être sur le bateau pendant
qu'il n’arrêtait pas de faire des ronds dans l'eau à la recherche
des poissons. A partir de là elle n'a pas cessé de bouder jusqu'au
déjeuner qui l'a un peu déridéé. Ah ces couples qui s'engueulent
dans des coins pareils et qui se privent d'un délice ! Je ne
comprends pas pourquoi les gens sont si compliqués. Sans doute un
excès d'orgueil. Il faut prendre la vie et les gens comme ils sont,
avec beaucoup de simplicité. En tout cas je suis bien mieux tout
seul dans mon aventure sans quelqu'un qui m’empêcherait de la
vivre pleinement comme je le souhaite. Devant tant de tensions,
l'australien fuyait en pressant le pas dès qu'on s’arrêtait
quelque part, préférant la compagnie des poisons à celle de sa
greluche aux sautes d'humeurs. Après le déjeuner il a tenté une
approche de réconciliation par la douceur, en cherchant à la
prendre dans ses bars pour l'embrasser, elle résistait encore, raide
et tout d'un bloc comme un chat à qui on veut donner un bain. Je te
pousserais ça à la flotte !
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La plage de rêve |
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L'accès à la plage du haut |
Pour le déjeuner on a eu
une petite plage pour nous tout seuls, dans le détroit entre Maniloc
et Tapiutan. Une merveille de sable blanc avec des eaux bleu
turquoise qui finissent par un tombant propice au snorkeling. Dès
que j'ai mis le pied là je n'ai pas résisté à essayer de
m'emmancher dans une végétation inextricable poussant sur des
rochers coupants comme du verre, à la recherche d'un point en
hauteur pour avoir une vue encore plus magnifiée. Notre guide m'a
demandé de faire attention. N'ayez crainte j'ai l'habitude !
Sauf que sur ce coup là j'aurais été mieux avec mes Crocs restées
à bord que pieds nus, ce qui m'aurait évité l'entaille du pied.
Mais j'ai réussi à trouver un rocher, après des contorsions à
n'en plus finir entre branches et lianes. Je surplombais tout le
fjord et la plage où ils étaient en train de dresser la table. Les
gens n'en revenaient pas et l'australien a tenté de venir mais est
resté bloqué plus bas. Avec un peu de détermination, je me faufile
partout comme un chat ! Des pique-niques comme ça j'en veux
tous les jours ! Assis sur un tronc échoué et faisant un banc
parfait, les pieds dans le sable, aveuglé par tant de beauté, c'est
une vue qu'on ne peut pas oublier. A postcard from heaven, comme
disent les anglais.
Après le déjeuner on a
filé juste un peu pus loin où se trouve derrière une petite crique
un chapiteau qui fait office d'église avec en son centre un grand
crucifix et des statues de Marie. Il y a des inscriptions qui
disent : « In the island of Matinloc, God's mystery
continues to unfold with its mysterious rock formations, reminding us
of His Plan of Salvation and His love for man. Matinloc invokes in
everyone a sense of awe and humility while realizing the island's
message – one of love, and of hope. ». On y trouve aussi
trois tombes. Mais le clou reste une courte ascension par un escalier
aux marches larges comme une demie chaussure et très hautes,
taillées dans les rochers coupants, pour arriver en haut avec une
vue fantastique sur le détroit avec des aiguilles en contrebas qui
se dressent comme des lances. Je n'en reviens pas de la forme de ces
aiguilles. Elles sont si fines qu'on dirait des lamelles qui vont
casser si on les touche. C'est un des endroits phares de la journée.
Mais le plus beau est à venir.
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Helicopter island |
En passant du côté est
de Matinloc, on découvre un endroit merveilleux dès l'entrée. Le
bateau est obligé de rester en dehors et on passe à pied en
marchant dans l'eau entre deux falaises aux aiguilles déchiquetées.
On n'est plus sur terre mais dans un autre monde. Et ce n'est pas
fini. Ce passage en rejoint un autre, faisant face à une plage de
rêve, à la végétation luxuriante, s'ouvrant sur une anse parfaite
au pied d'une montagne. Je n'ai jamais vu une plage aussi belle, une des
plus belles de toutes celles que j'ai vues dans ma vie. C'en est à
pleurer. Comment de tels endroits ont ils pu être façonnés,
comment le sable a pu se retrouver là ? Palawan est un mystère,
une énigme qui fascine et envoûte. Il faut voir ça une fois dans
sa vie, c'est tellement incroyable ! J'en avais les yeux
humides, voyant tout trouble pour prendre les photos, n’arrêtant
pas de m'essuyer le nez. L’australien - qui me suit un peu comme un
chien car il aime bien prendre des photos comme moi et on a un peu le
même œil, aussi on se retrouve souvent aux mêmes points
stratégiques pour avoir les meilleurs angles - n'en revenait pas
non plus et parlait tour seul marmonnant des « wouah »,
« incredible », « fantastic ». Je suis
certain qu'ils ont dû tourner une partie du Koh Lanta Palawan ici,
sinon je ne connais plus mes classiques. Il faudra que je vérifie en
rentrant.
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Helicoper Island |
Quand on est sorti de là
tout le monde avait la banane et souriait béatement sur le bateau
comme touché par la grâce. L'asiatique était redevenue normale et
dorlotait son fiancé. Un endroit pareil a de quoi dérider le plus
féroce des dictateurs. Ils devraient y faire venir les dirigeants
des pays en guerre et le monde serait un peu plus paisible. Il manque
juste un lagon à Palawan pour en faire le plus beau coin sur Terre.
Mais on ne peut pas avoir des reliefs aussi abrupts et déchiquetés
et avoir en même temps un lagon, c'est incompatible. Il faut choisir
entre îles hautes ou atolls. Chacun a ses avantages et
particularités et la bonne nouvelle c'est qu'avec mon tour du monde
j'ai vu les deux ! On a fini en beauté à Helicopter Island que
j'avais pensé à rejoindre en kayak le premier jour. Heureusement
que je ne l'ai pas fait car je n'aurais pas pu rentrer. Comme l’île
se trouve au centre de la baie de Bacuit, le vent s'y engouffre très
fort du nord est, formant de grosses vagues qui faisaient tanguer le
bateau et crier l'asiatique de manière hystérique qui ne pouvait
plus s’arrêter de rire, comme possédée. Décidément elle passe
d'un extrême à l'autre dans ses humeurs ! La plage de
Helicopter Island est un peu comme Seven Commando hier : c'est
le dernier arrêt de tous ceux qui ont opté pour le tour C. Aussi il
y a pas mal de monde. J'ai d'ailleurs retrouvé des compagnons
d'excursions d'hier. Mais j'ai trouvé un coin tranquille où j'ai
fait une petite sieste qui n'a pas duré longtemps, refusant de
dormir trop longtemps car me privant de vues et des sensations. C'est
un crime de fermer les yeux dans un endroit pareil !
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Une autre vue de ma plage préférée |
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La dent |
Il y a un rocher qui me
fascine pas très loin de l’hôtel, plus au sud. Il fait face à
une belle plage déserte avec de très nombreux cocotiers que je
n'aurai hélas pas le temps d'explorer. Le rocher semble être une
dent de géant dans la mer. Mais pas n'importe quelle dent, une
grosse molaire, ou mieux, une dent de sagesse. Comme j'ai été
sage... La vue sur la baie de l’hôtel depuis le bateau est très
belle. On est vraiment dans un très beau coin, tranquille, et je
n'avais pas réalisé toute cette jungle qui se trouve juste derrière
et qui grimpe sur les hauteurs d'une colline. J'ai bien fait d’être
descendu là, c'est sans doute le meilleur coin de El Nido, loin de
la ville qui elle est plongée dans l'ombre des falaises dès 16
heures alors qu'on a un beau coucher de soleil ici tous les soirs qui
disparaît au loin derrière Miniloc.
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L’hôtel sur la droite |
A peine rentré, j'ai
filé direct à la réception réserver le tour B. J'ai bien fait
répéter pour être sûr que la réceptionniste avait bien compris.
Maintenant que j'ai compris le système... La russe s'y est également
inscrite. Je lui ai demandé pour quel tour, elle m'a confirmé le B.
Tout roule donc. Le tour B promet d’être grandiose, naviguant
autour de bancs de sable qui relient des îles-falaises. Mais je
n'en dis pas plus. Une excursion différente tous les jours, ainsi va
la vie ! Je ne me refuse rien.
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Un dernière de ma plage |
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