Nat Nat Beach, Cadlao |
En partant de l’hôtel
j'ai croisé Helena à qui j'ai donné ma carte et qui m'a invité en
retour à Shanghai. On s’est trouvé cons, on ne savait pas s'il
fallait se faire la bise ou quoi, et gênée elle m'a tendue la main
en s'approchant comme si elle voulait me rouler une pelle. Le salut
russe sans doute ! A la place je lui ai fait une bise à
laquelle elle n'a pas répondu et qui l'a laissée raide, sans doute
surprise. Avec les différences de culture, on ne sait jamais ce qui
se fait de ce qui ne se fait pas...
Ce matin nous n'étions
plus que dix à prendre place sur le bateau Diwa, un groupe ayant
préféré rejoindre l'autre bateau pour ne pas être séparés. Du
coup la taille de notre groupe est parfaite et tout le monde s'en
félicite. Au final il y a 2 couples de suédois dans leur vingtaine
- des blondinets et des blondinettes, un couple de hollandais dans la
cinquantaine que j’avais croisé sur le tour A, deux anglaises dont
l'une passe la moitié du temps à voyager (j'y reviendrai), un
allemand passionné de plongée et moi, plus 5 membres d'équipage :
le guide, le capitaine, un mécanicien, une cuisinière et un des jeunes fils du guide qui est là pour aider. Il faut bien ça !
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Par contre on a le tour le moins organisé, c’est comme si l'on
était les premiers à étrenné l'excursion. Pourtant cela fait 5
ans que Tao Philippines est née, par un philippin qui a fait la
traversée par ses propres moyens entre El Nido et Coron et a eu
l'idée d'organiser des tours sur son bateau, après avoir négocié
avec les villageois les autorisations en leur faisant comprendre
qu'ils avaient tout à y gagner. Depuis ça ne désemplit plus, ils
ont été obligé de louer des bateaux afin d'organiser des tours
supplémentaires et cette année pour la première fois ils sont
obligés de refuser du monde. Il faut dire que Tripadvisor est passé
par là et que tous les avis publiés sont unanimes et dithyrambiques
avec des mentions telles que « Our highlight in the
Philippines ». La croisière sur 5 jours permet d'explorer les
iles Calamianes au nord de El Nido. Autrement il faut se farcir un
ferry pendant 8 heures. L'avantage de la formule est de naviguer
paisiblement entre les îlots, s’arrêtant dormir où bon nous
semble (matériel de camping fourni) après des haltes balade ou
snorkeling. Le programme idéal qui a tout pour me ravir. Le Petit
Futé dit des îles Calamianes : « Aventuriers, c'est ici
qu'il faut venir poser son sac à dos pour profiter d'une nature
vierge et d'activités sportives dans un cadre de rêve. Les
Calamianes sont le trésor caché des Philippines, une destination de
prédilection pour l'écotourisme. ». Je ne sais plus comment
j'ai entendu parler de cette expédition, elle ne figure ni dans le
Petit Futé ni le Lonely Planet. Sans doute par un blog en préparant
ce voyage.
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Je disais qu'on avait le
bateau le moins organisé car tout prend des heures. C'est du temps
perdu en permanence. L'autre bateau avait déjà déguerpi quand on
en était encore à recenser les convives. Idem pour le chargement
des bagages dans le bateau. Mais ce n’est pas grave j'ai tout mon
temps et en plus il ne fait pas beau aujourd'hui et je suis content
d'avoir pu profiter des excursions des jours précédents sous le
soleil. En plus le programme du jour est prévu pour être une
réédition de ce que j'ai vu avec une exploration des îles de
l'archipel de Bacuit et une nuit sur Tapiutan Island, l’île de
l'autre côté du détroit à Maintiloc. Mais à peine le programme
annoncé et le bateau lancé, notre guide, nous fait part déjà d'un
changement d'itinéraire : on fera le tour de Cadlao, cette île
que j'avais explorée en kayak, passant de l'autre côté où jamais
personne ne se rend, question d'éviter les bateaux des touristes.
Seulement à notre premier arrêt, à la plage numéro 1, après
avoir fait du snorkeling le bateau est tombé en panne. Impossible à
redémarrer.
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Je comprends maintenant pourquoi on a un mécanicien à
bord. On est resté une bonne heure ainsi, le mécano étant descendu
dans la cale du navire cachée par une plaque en contreplaqué. Le
bateau est une pirogue pas tellement plus grande que celles que je
prenais lors des excursions. Il n'y a pas de cabine pour dormir. Le
pont dispose de deux bancs qui se font face avec à l'arrière une
sorte de bar qui est le poste du capitaine et qui comporte des
étagères où tous le fruits et légumes ont été placés pour le
séjour. On se croirait au marché et ça fait très joli. Derrière
cette cabine tronquée, se trouve un local clos qui sert à
entreposer nos bagages. Enfin, tout à l'arrière du bateau on trouve
la cuisine. Au dessus du local à bagages ont été disposés des
matelas sur lesquels quatre personnes peuvent s'étendre, abrités
par une toile en forme de tente canadienne. Les suédois adorent et
ils ont squatté l'espace toute la journée. Entre la cuisine et le
local il y a aussi une chiotte par laquelle on accède en marchant
sur une planche suspendue au dessus des eaux, risquant la chute et la
glissade à tout instant. Quand aux chiottes, il faut être
contorsionniste. Elles font voûtées, le plafond est haut d'à peine
un mètre et la cuvette collée à la paroi du fond. Pour faire pipi,
je vous passe les détails mais il faut être plié en deux, les
jambes écartelées, se tenant d'une main et faire preuve de
dextérité pour ne pas rater la cible. Mission impossible, en plus
avec les vagues je repeins à chaque fois les murs. Heureusement il y
a un bac rempli d'eau que j'utilise pour nettoyer derrière mon
passage. C'est mieux pour les filles qui doivent s'asseoir après...
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Comme on avait pris
beaucoup de retard sur l'itinéraire prévu, rien de plus simple, le
guide l'a changé. Plus question d'aller explorer un lagon sur
Cadlao, direction la plage prévue pour le déjeuner et exit la pause
de l'après midi sur la plus longue plage d'El Nido de 7 kilomètres
de long que nous avons dû nous contenter de voir de loin, une belle
plage déserte et frangée de cocotiers tout du long. Je n'aime pas
qu'on m'annonce un programme dont je vais me réjouir puis qu'on
revienne dessus en disant «on n'a pas le temps ». Ça me
frustre ! La plage où nous nous sommes arrêtés pour le
barbecue est une plage privée de Tao Expeditions, nichée dans la
jungle au pied de rochers hauts comme des montagnes. On a été
accueilli par les résidents, des chiens et chiots devant lesquels
tout le monde s'extasiait. Même moi je me suis surpris à être
séduit par un chiot tout fou qui remuait de la queue quand on le
caressait en se tordant dans tous les sens, les yeux fermés de
bonheur et les pattes en l'air toutes détendues.
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Je pouvais en faire
ce que je voulais. Je lui ai tripatouillé les coussinets des pattes
arrière pour voir, ça lui procurait des réactions incontrôlées
des pattes arrières. Les chiens craignent donc les chatouilles !
Faudrait juste pas que ça grandisse. Après ça pue et ça aboie !
Sur la plage il y avait aussi un petit singe attaché à un arbre
pour éviter qu'il ne chaparde tout. C'est devenu la mascotte, il
passait d'épaule en épaule avec une prédilection pour celles de
l'allemand, Robert, qu'il ne voulait plus lâcher. Ça nous ressemble
beaucoup dans les mimiques et on est étonné d'entendre un cri et
pas une voix ! C'est aussi très intelligent : quand il
s'entortillait autour de sa laisse, il faisait des tours de branche
jusqu'à se démêler les pinceaux. Pas comme une chèvre qui à sa
place se serait retrouvée ligotée par elle même. Je lui ai donné
la peau de la mangue que je venais de manger pour le dessert, et il a
tendu sa main pour prendre la pelure dont il s'est emparé comme on
prendrait un journal. Ensuite il a tourné et retourné la peau,
scrutant les moindres recoins où il y avait de la chair et quand
c'était terminé, après une dernière inspection il l'a jetée au
loin jugeant qu'il n'y avait plus rien à en tirer. On a demandé à
notre guide si ça savait nager. Il nous a fait la démonstration en
allant se baigner avec la bestiole sur l'épaule et en le poussant à
l'eau. Et ça nage, avec même un sillage derrière lui !
Nat Nat Beach, Cadlao |
On est un bon groupe,
l'ambiance est bonne et même si les âges sont très variés, il n'y
a personne qui soit venu pour faire la fête. Comme quoi être jeune
n’empêche pas d’être aventurier. L'une des anglaises, celle qui
travaille quand elle veut, nous a dévoilé son secret : elle
est médecin, ne fait que des remplacements et ne veut surtout rien
faire d'autre. Du fait de contrats de courte durée son salaire est
majoré de 50% ce qui lui permet donc de voyager, se servant de la
prime censée lui permettre de quoi se retourner entre chaque
contrat. Elle est jeune et n’arrête pas de faire le tour du monde.
Devant les airs interloqués et admiratifs de l’assistance, elle
n’arrêtait pas de répéter dans un sourire : « Why
not ? Why not ? ». On peut dire que son compte est
bon et qu'elle est foutue pour la société ! Ainsi elle fuit
l'Angleterre tous les hivers et adore les îles, surtout celles du
Pacifique où elle vient chaque fois. Elle est déjà restée plus de
trois mois aux Îles Cook. J’aimerais bien être comme elle, pas
forcé de tout inclure dans un seul voyage, en me disant que j'y
reviendrai l'année d'après, prenant non temps...
Campement sur Parm Island |
Dans l'après midi, sur
le trajet, ceux qui voulaient ont péché, en laissant traîner un
calamar en plastique au bout d'un fil de pêche enroulé autour d'une
bobine. Pas de cane à pêche. Et ça a bien marché. La première à
avoir choppé, c’était une des suédoises, un long poisson tout
gris. Notre guide lui a ensuite fait son affaire et est allé dégoté
un manuel de reconnaissance des poissons des mers du sud-est
asiatique, un livre australien, afin que l'on s'amuse à identifier
de quel poisson il s'agissait. J'ai été le premier à m'emparer du
pavé, que j'ai monopolisé un bon moment, oubliant le but initial de
la chose et essayant de reconnaître les trouvailles que j'avais vues
en snorkeling jusqu'ici auxquelles je donnais des sobriquets
ridicules. Le beau poisson jaune et noir rencontré initialement à
Oarsmans aux Fidji, c'est un Oriental Sweetlips. Avec son nom je
comprends pourquoi je ne l'avais encore croisé nulle part avant.
Pour le poisson œuvre d'art de White Island à Camiguin, c'est celui
qui m'a donné le plus de fil à retordre, j'ai dû parcourir le
guide 3 fois. C'est en fait un jeune Spotted Sweetlips dont j'ai
trouvé par miracle le dessin en tout petit dans un coin. Car à
l'âge adulte il perd ses tâches et ses ronds. Enfin la boîte à
savon d'il y a trois jours, je n'étais pas loin du but : Black
Boxfish (le poisson boîte). Finalement les vrais noms ne sont pas
tellement éloignés de leurs caractéristiques et mes surnoms ne
sont pas si débiles que ça ! En feuilletant le guide qui
comportait à la fin des photos d'endroits remarquables, j'ai été
attiré par une photo dont le descriptif est très alléchant,
parlant de fjords mais avec des eaux tropicales : Kimberley
Coast, en Australie. A inclure donc pour mon prochain voyage, quand
je retournerai en Australie !
Campement sur Parm Island |
Après les émotions de
la pêche a suivi la pause goûter. Il sort des trucs tout le te
temps et je suis sidéré quand je vois la taille du bateau, je me
demande toujours où ils vont chercher tout ça. On a à disposition
toute la journée du thé glacé, de l'eau douce pour se rincer en
s'aspergeant après s’être baigné. On nous a servi des bananes
caramélisées. Je n'avais jamais vu ça auparavant et c'était un
délice. On a tous retenu la recette, désarmante de simplicité,
qu'on s’est tous juré d'essayer de retour chez nous. Notre guide
dont je ne me souviens toujours pas du nom - ça va venir, c'est
juste que c'est un nom exotique pas facile à se rappeler - est passé
parmi nous avec une fiche où étaient inscrits nos noms pour l’aider
lui aussi à mémoriser qui est qui. Sur la fiche il y avait
également nos âges respectifs. Ils n'avaient dû voir que notre
année de naissance car je me suis retrouvé affublé du numéro
« 41 ». Ça m'a fait un choc ! Je m'en fous de mon
âge, une fois oublié je vis très bien avec. Je ne fais pas de
crise particulière de la quarantaine. Mais de le voir écrit...
Quelle horreur ! Ce 4 est très laid et ça fait un an que je le
trouve tout aussi moche. D'un autre côté les chiffres qui
m'attendent sont encore pire : 5, 6, 7... De grâce, ne me
souhaitez plus d'anniversaire, ça m'évitera de m'en rappeler !
Un dernier bain? |
Ce soir nous avons jeté
l'ancre sur une plage presque déserte mais comportant 4 ou 5 maisons
de pécheurs. Cela a suffit pour que 7 clebs arrivent à notre
rencontre en aboyant. Je suis allé direct chercher une solution de
repli au cas où. J'en ai trouvé une à une dizaine de minutes de
marche, sur une autre plage, réellement déserte. Le camp pour ce
soir appartient par contre à Tao Philippines, c’est dans une
grande cocoteraie où ils font également pousser des légumes. Les
cases ne sont en fait que des plateaux en bois sur lesquels ils nous
ont mis une moustiquaire et un matelas, sous un abri bâché dont les
« cloisons » sont des tiges de bambou espacées de 5
centimètres l'une de l'autre avec une autre bâche sur le devant
pour couper le vent. J'ai tenté d'y dormir, mais au bout d'une
heure, avec boules Quiès plus le casque de baladeur, quand j'ai vu
que rien n'y faisait et que les crises de clebs se faisaient de plus
en plus proches, j'ai déguerpi de là, ma tente sous le bras, pour
retrouver les joies du camping sauvage que je n'avais pas expérimenté
depuis Palau.
Notre premier feu de camp |
Pour finir en beauté
cette journée, on a eu droit à un massage inclus dans l'expédition
et dispensé par des femmes du village, avant le dîner. C'était
divin, allongé à se faire dorloter sur la plage, avec le clapotis
de l'eau et le vent dans les cocotiers. Comme la nuit était déjà
tombée on pouvait admirer les étoile ou simplement fermer les yeux.
Tout y est passé, depuis le cuir chevelu jusqu'aux doigts de pieds.
Elle se donnait bien du mal. Par moment j'étais surpris de sentir
des nœuds. Après cinq mois de tour du monde, je ne devrais quand
même plus avoir de tensions. Elle les sentait, et après 4 ou 5
passages, les nœuds avaient disparu. Par contre j'ai des zones
sensibles où ça n'était pas très agréable, comme le dos, vers là
où j'ai un problème, où je me raidissais chaque fois qu'elle
passait dessus et le massage des tempes qui est un supplice. On a
l'impression que le crâne va exploser! Le massage du cuir chevelu
sur cheveux poisseux ce n'est pas non plus génial, on a l'impression
de se faire scalper et j'en avais les larmes aux yeux. Quand on sort
de la séance, qui a bien dû durer une heure, on ne sait plus où
l'on est et on avance comme un zombie en titubant. Il faut un petit
moment avant de redescendre sur terre. Maintenant que je suis en
Asie, c'est comme avec la noix de coco fraîche, va falloir que je
réitère l'expérience. C'est le moment où jamais !
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