Camiguin - prononcez
camiguine et non camigouine comme ce que je disais au début - est
une île située dans la mer de Bohol. OK, ça ne vous aide pas
beaucoup ! En fait, regardez une carte des Philippines, trouvez
Manille et filez au sud-est vers la grosse île de Mindanao, la plus
au sud-est possible. A peu près au milieu de Mindanao, au nord, se
trouve un confetti, c'est là ! En guise de confetti, comme je
disais hier, l’île est assez vaste et son tour fait 56 kilomètres
que je compte bien parcourir un de ces jours. On y compte 7 volcans
dont le plus haut, le Mont Hibok Hibok (aussi le nom de mon
bungalow!) culmine à 1250 mètres et qui est toujours actif. Sa
dernière éruption remonte à 1951 et tua 2000 personnes. Gageons
que cela attende un peu avant qu'il se réveille ! Camiguin
offre donc des paysages montagneux, des forets luxuriantes, des
rivières, des sources d'eau froide ou chaude selon les goûts de
chacun. Ça me rappelle un peu la Dominique, en plus peuplé tout de
même et moins énigmatique. Je comptais bien l'explorer sans plus
tarder.
Enigmata Tree House |
Mais auparavant je suis
pris par l'écriture du blog pour tous les épisodes de Palau
scribouillés sur le cahier. Ça me prend une éternité, c'est un
vrai boulot. Rien que pour la partie Bablomekang - Ngemelis que je
viens de publier, j'ai commencé l'écriture à 6 heures du matin
pour la terminer à 10. Ensuite il m'a fallu une heure pour choisir
les photos puis une autre pour tout publier sur internet. Ils doivent
se demander ce que je suis venu faire ici, je suis toujours pendu à
l'ordinateur. Moi aussi ça me dérange un peu car du coup j'ai
toujours les souvenirs et la tête à Palau alors que je devrais me
sentir 100% disponible pour apprécier Camiguin. Sinon, pourquoi
avoir fait tout ce chemin, j'aurais tout aussi bien pu faire la même
chose à Manille !
Même s'il était midi,
j'ai pris la décision de louer une moto à la réception. C'est une
petite moto mais je n'en ai jamais conduite. Je me suis senti con
quand on m'a donné la clef. Déjà je cherchais où mettre mon sac,
j'ai essayé de tourner la clef dans tous les sens comme s'il
s'agissait d'un scooter, espérant que le siège s'ouvre.
Mais
l'espace sous le siège est réduit aussi si ça trouve ça ne
s'ouvre pas. Je me suis mis à plat ventre sur le siège pour
regarder de près dessous s'il y avait un système de fermeture. Je
n'ai rien trouvé, j'ai donc gardé mon sac à dos sur les épaules
et je suis parti pour l'aventure. La moto avait le réservoir vide,
j'ai dû d'abord passer à la station service. En chemin sur le
cadran il y avait des ronds allant de 1 à 4 dont seul le premier
était allumé. Des vitesses ? J'avais beau chercher je n'ai pas
vu où ça se trouvait. J'ai donc continué comme ça et j’avais
l'impression que je poussais l'engin. Le moteur était brûlant, me
cuisait les mollets et les gens se retournaient sur mon passage. Je
roulais à 40 alors que la moto peut monter à 120. Je n'ai pas
besoin de dépasser les 40, au delà je ne trouve pas cela très
prudent, si je crève ou rencontre un obstacle, je préfère aller à
vitesse de mobylette. En conduisant j'avais la vision d'un ami à moi
qui a eu un grave accident de scooter en ville et est resté dans le
coma, a perdu la vision d'un œil et a des troubles du comportement
depuis. Je n'avais pas envie de suivre son chemin. Je suis bien
content d’être entier et tiens à le rester. Être diminué est ce
qui pourrait m'arriver de pire, moi qui suis si indépendant. Je me
suis fais une devise dans la vie de ne compter que sur moi même,
c'est le plus sûr moyen de ne pas être déçu et d'arriver à ce
que je souhaite, sans avoir de contraintes ni de justification à
fournir. C'est le prix de ma liberté.
Katibawasan Falls |
A la station service, ils
ont eu besoin d'avoir accès au réservoir. Ils ont pris la clef et
ouvert le siège qui disposait d'une serrure que je n'avais pas vue.
Et il y a un petit espace à côté du réservoir où j'ai glissé la
bouteille d'au. Ça fait ça de moins sur les épaules ! Et un
truc de plus que je connais avec la moto. Je n'ai pas arrêté de me
faire klaxonner. Je conduis instinctivement à gauche sans m'en
rendre compte, dès que je démarre. Et ici ça se passe à droite.
Décidément ça ne me quitte pas ! Il m'est plus difficile de
me refaire à la conduite à droite que l'inverse. C'est bizarre tout
de même !
Ici tout le monde circule
à moto. C'est très rare de croiser une voiture. Alors je les
observe. Il y en avais un devant moi qui a réduit les gaz, appuyant
en même temps sur une espèce de tige derrière le repose pieds.
J'ai la même. Et une autre aussi plus devant. Quand j'ai appuyé à
l'arrière le moteur tournait dans le vide. Bizarre comme truc. J'ai
essayé la tige de devant et là le voyant 2 s'est allumé et j'ai
changé de cadence. Tout d'un coup j'ai compris que ça changeait les
vitesses ! Rigolez pas, c'est pas intuitif et c'est la première
fois que je pilote une moto. J'aimerais vous y voir ! D'ailleurs
on a une drôle de position quand on est assis, j'ai l'impression
d’être écartelé sur une Harley Davidson, les jambes écartées
et les coudes très éloignés, les bras tendus. Avec mon gabarit
fluet depuis quelques temps (j'ai perdu du poids, mais combien, je ne
le saurai qu'en rentrant), je dois avoir l'air cruche. D'ailleurs les
gamins rigolent sur mon passage. Et avec le casque rouge façon
casque de pilote d'avion japonais de la seconde guerre mondiale, ça
n'aide pas ! Mais je m'en moque, je roule !
Katibawasan Falls |
Mon premier arrêt figure
sur la carte qu'ils m'ont donné, une photocopie avec les sites
d’intérêts marqués d'une étoile pour les plus remarquables et
d'un losange pour les autres. J'ai été alléché par le nom,
Enigmata Tree House. En fait je ne l'ai même pas trouvé au début,
c'est en rebroussant que j'ai fini par tomber dessus. C'est juste une
espèce de bicoque tarabiscotée et penchée avec des tours, toute en
bambou qui semble être un château de carte prompt à s'écrouler et
qui pousse à côté d'un arbre à moins que l'arbre soit en son
centre, on ne sais plus, ça n'a ni queue ni tête ! Je ne sais
pas ce que c'est, apparemment c'est une galerie pour présenter des
œuvres mais on ne voit rien et il y a des niveaux où l'on doit
enlever ses chaussures pour se retrouver au final face à une porte
fermée. Ou dans un salon de restaurant avec un blanc occupé sur son
ordinateur et qui ne m'a même pas entendu. Il y a aussi des bassins
fléchés censés être des piscines où l'on s’attend à trouver
des lotus. Rien de la sorte, ils sont à secs ! Drôle
d'ambiance ! J'ai repris la moto pour Katibawasan Falls, un
endroit fléché depuis la route principale qui fait le tour de l’île
comme faisant 250 pieds de haut (c'est à dire... euh ça fait haut).
Katibawasan Falls |
Comme toujours, pour
avoir le droit de s’arrêter, on doit payer 10 pesos à un type qui
attend de pied ferme en souriant et qui est là quand il y pense. Des
petits malins ont donc pu se garer sans rien débourser. Après c'est
grillagé et il faut laisser son nom sur un registre et s'acquitter
d'un droit d'entrée. La cascade est haute mais n'a rien de vraiment
sauvage, il y a un bassin à son pied où des gens sont affairés à
faire des travaux d'entretien et à déblayer l'évacuation. Des
gamins s'amusent dans les rochers pendant que les plus grands sont
dans le bassin, presque sous la cascade, occupés visiblement à
pêcher (mais quoi, mystère!). C'est là que j'ai pris mon déjeuner,
des toasts que j'avais commandés au restaurant du resort, au fromage
et tomates. C'est tout de même pratique d’être dans un pays où
la vie n'est pas chère. Il n'y a pas besoin de sortir de chez soi et
on peut s'octroyer des services que l'on ne pourrait pas dans nos
contrées. Par exemple le massage ici est à 150 pesos, soit 3 ou 4
euros, c'est à dire au moins 10 fois moins cher qu'en France. Il va
falloir que j'essaye. Mais pas n'importe où. Je me suis déjà fait
brancher dans la rue à Palau par des nénettes qui me vantaient leur
massage depuis un drôle d'établissement un peu sordide. Je ne veux
pas finir dans un truc où l'on me demanderait si je souhaite la
finition (les adeptes comprendront) !
Ardent Hot Springs |
J'ai poursuivi en
revenant un peu sur mes pas pour me rendre à Ardent Hot Springs, une
curiosité naturelle totalement aménagée où coule un cours d'eau.
Là aussi il faut payer et il y a même un resort dans l'enceinte et
on peut y camper. On y trouve un snack, des toilettes... Il y a pas
mal de monde mais comme c'est grand ça laisse de la place. Le
ruisseau finit dans un bassin tout en longueur construit dans la
roche, avec différentes profondeurs et des mini cascades, protégé
des feuilles mortes par des filets disposés en hauteur. J'ai
commencé par mettre un pied dans la source qui alimente tout. De
l'eau froide ! C'est en panne ou quoi ? Que fait le
plombier ? C'est dubitatif que je me suis introduit dans le
bassin mais à ma grande surprise l'eau était chaude. La chaleur
doit donc provenir de la terre. En tout cas c'est très agréable, on
a l'impression d’être dans sa baignoire dans un jardin luxuriant.
C'est propice à la rêvasserie et je suis resté là deux heures à
me triturer les pieds comme un bébé dans son bain.
J'en suis sorti
uniquement car j'avais envie de faire pipi. Je ne pouvais pas faire
là dedans alors que des gens se trouvaient dans les bassins en
dessous... J'ai essayé plusieurs bassins, testant toutes les
positions, la planche, sur le côté, assis, allongé ou semi
allongé. Après ça j'avais une peau de lézard tendance la mue est
proche. C'est étrange car en nageant on a l'impression de couler, la
densité est différente de la mer ou d'une piscine. On a
l'impression de faire le double de son poids.
Après tout ça je suis
rentré. C'était la sortie des écoles, les bas côtés très animés
et du monde partout. J'ai pris une école en photo. Les élèves
portent tous l'uniforme, les petites filles une robe à plis noir
avec des des chaussettes hautes blanches et un chemisier bleu
turquoise. Je suis aussi passé devant une église où tout était
écrit en espagnol. Les Philippines ont en fait été colonisées par
les conquistadors et ont appartenu à l'Espagne jusqu'en 1898, où
l'indépendance fut proclamée.
Il en reste donc quelque chose. Il y
a encore des noms de gens écrits en espagnol et même des panneaux.
Quant à la langue elle n'a rien à voir même s'ils ont dû inclure
des mots espagnols, comme « pero » que j'entends
beaucoup.
Au restaurant ce soir je
ne me suis rien refusé. Je mène une vie toute autre de celle que
j'avais à Palau. Mais ça me convient aussi, je reprends des forces
pour poursuivre le reste de mon aventure. Par moment je me sens las
et après avoir vu Ngemelis je me dis que maintenant que j'ai vu le
plus beau je peux rentrer. C'est comme voir Venise et mourir. Après
5 mois j'ai l'impression de ne plus apprécier autant. Mais ce sont
juste des humeurs passagères, c'est différent de ce que je
ressentais après la Nouvelle Zélande, quand j'avais envie de
rentrer. Là c'était un cap à franchir. Depuis je n'ai plus songé
un instant à rentrer. Et maintenant qu'il ne me reste plus deux
mois, c'est déjà comme si c'était la fin.
Pourtant je ne réalise
pas encore, c'est comme si je n'allais jamais rentrer. En même temps
j'ai envie de rentrer pour voir les gens que j'aime. Mais pas pour
rester, je me verrais bien repartir à nouveau à l'automne, comme un
oiseau migrateur !
Au repas il y avait un
truc qui ressemblait à du pistou servi dans une soucoupe pour
accompagner la viande. Avant d'en mettre j'ai goutté avec la
fourchette. Ça arrachait au point de sentir tout l'intérieur se
crisper ! Moi qui d'ordinaire me chope tout ce qui traîne côté
alimentation, j'ai dû dépasser le stade de la tourista. Il paraît
que ça arrive au cours des premiers jours. Pourtant je ne me prive
de rien : glaçon, crudités, salades de fruit, jus de fruit,
tout y passe ! Si je devais me priver de ce que je préfère
pendant 7 mois ce ne serait plus une vie. Espérons que le fait de
l'écrire ne fasse pas changer les choses !
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